Haïti/Environnement – Économie: Problématique de l’eau potable en Haïti, un vrai problème de développement
La Direction nationale de l’eau potable et de l’assainissement (Dinepa), ainsi que plusieurs partenaires dont la Banque interaméricaine de développement (BID) et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (Unicef) ont consacré cette semaine à la problématique de l’eau en Haïti, selon ce qu’a rapporte un dernier article d’AlterPresse. Il faut dire que cette semaine coïncide avec la journée mondiale de l’eau des Nations Unies, le 22 mars dernier.
Le thème global qui a été retenu pour cette année est « Eau et développement durable ». Un thème qui devrait permettre aux différents pays du monde de mettre l’emphase sur le caractère fragile de l’eau comme ressource et la nécessité d’entamer des actions pour assurer une utilisation qui soit au bénéfice des générations futures.
En Haïti cette semaine vise l’objectif de parvenir à une meilleure synergie des efforts des acteurs de l’eau autour des thématiques ciblées ; faire de l’eau une ressource d’avenir tout en garantissant sa gestion, sa disponibilité et sa qualité.
Selon l’Unicef l’un des acteurs clés du secteur de l’eau en Haïti, cette semaine d’activités, de discussion, d’échanges et d’ateliers doit permettre d’inciter les réflexions et les échanges entre les acteurs du système sur la nécessité d’initier de nouvelles actions pour garantir la durabilité de la ressource ainsi que celle des services à l’eau.
Selon les dernières données de l’enquête sur la mortalité, morbidité et l’utilisation des services (EMMUS V), le taux de couverture en eau potable en Haïti est de 54 %. Selon les chiffres plus récent de l’UNICEF et OMS, 2013, on fait état d’un taux de couverture nationale pour l’eau potable de 64% avec un taux de 77% dans les zones urbaines et seulement 48% dans les zones rurales, sans parler du niveau de la qualité de l’eau fourni et le degré d’accessibilité pour certains ménages qui constitueraient tout un autre débat.
En effet, seulement 8% de la population s’alimente en eau de boisson à une source disponible sur place, 56 % de la population a besoin de plus de 30 minutes pour aller se procurer de l’eau. Egalement, près de 3 millions d’Haïtiens puisent l’eau de boisson dans les rivières et dans des sources non protégées, donc une eau de qualité douteuse contribuant à la prévalence des cas de diarrhée chez les enfants, signale l’Unicef.
De son coté, le taux d’accès à l’assainissement de base est de 26%. De manière désagrégée, 34% de la population dans les zones urbaines ont accès à des installations sanitaires de base, ce qui laisse les deux tiers de la population urbaine notamment les enfants dans des conditions de risque extrême de péril fécal. Au niveau national, 23% de la population pratique la défécation à l’air libre dont 41% de la population des zones rurales.
Il faut dire que les conditions liées à l’eau et à l’assainissement, qui étaient déjà précaires, se sont détériorées après le séisme du 12 janvier 2010. Haïti se trouve donc très loin en termes d’accomplissement des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) en la matière. Nous ne sommes pas vraiment surpris, car depuis près de 10 ans il n’y a jamais eu de vrais politiques publiques stratégiques visant à mettre ce pays sur les rails du développement en valorisant les secteurs porteurs de l’économie nationale comme le tourisme et l’agriculture.
Les défis sont de taille, il faut arriver à renforcer l’accès durable des populations les plus vulnérables dans les zones rurales et urbaines pauvres à l’approvisionnement en eau potable ainsi que l’adoption de pratiques d’hygiène ; et augmenter le taux d’assainissement, notamment dans les zones rurales, et dans les zones urbaines plus pauvres.
Cela doit passer par le renforcement des moyens et capacités techniques des acteurs locaux, communaux principalement, qui dépend d’une volonté politique, sans oublier l’éducation de la population qui doit passer par l’école, la famille aussi bien que dans les medias.
Selon les estimations du ministère de la Santé publique et de la Population, Haïti doit investir 130 millions de dollars US par an dans l’eau potable, l’assainissement et l’hygiène pour s’assurer que les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) soient atteints en 2025. Vu les contraintes budgétaires et la rareté des dons, il sera difficile de mobiliser ce montant annuel d’investissement, qui serait de toute façon mal géré vu la faiblesse de nos institutions, sans oublier les pratiques de corruption tant au niveau central ou communal. Les problèmes structurels et conjoncturels de ce pays sont très graves et les candidats, le futur gouvernement auront vraiment du pain sur la planche.
Etzer S. Emile, M.B.A
Economiste
Radio Vision 2000