La réorientation du Centre de Facilitation des Investissements devient nécessaire

Jeudi dernier le gouvernement a nommé une nouvelle personnalité à la tête du Centre de Facilitation des Investissements (CFI), en la personne de Norma Powell qui remplace à ce poste George Andy René. A noter que Norma Powell a travaillé pour la Brasserie Nationale (BRANA) au niveau des relations publiques, et elle était jusqu’à date présidente de l’association des industries d’Haïti (ADIH).

En effet, le Centre pour la facilitation des investissements (CFI), en tant qu’Agence nationale de promotion de l’investissement, a été créée le 31 Janvier 2006 par un décret présidentiel, à la suite d’un partenariat entre les secteurs public et privé, qui se reflète dans la structure de son conseil d’administration mixte.

Depuis sa création, environ 8 ans de cela, le CFI vient d’avoir son 4ème directeur, cependant ce centre n’arrive pas à avoir autant impact souhaité en termes d’investissement, et de recherche d’opportunités.

Pourquoi elle n’est pas si efficace?

Si pour certains, le problème peut s’expliquer par un manque de leadership, d’autres parlent de manque de moyens financiers. Cependant, nous pensons, que le problème est à d’autres niveaux. D’abord, le CFI est essentiellement un centre pour l’attraction des investissements étrangers, dans ce sens, vu son orientation il ne se soucie pas du tout des investissements et initiatives au niveau local. La prédominance de l’anglais sur son site internet en est une preuve. D’ailleurs, il est clairement dit sur la page d’accueil du site «Le CFI est le premier port d’escale pour les investisseurs étrangers intéressés à Haïti ». Donc voila les investisseurs étrangers comme cibles et clients. En fait, c’est une très bonne chose d’avoir une structure qui fait le lien avec les potentiels investisseurs étrangers, pour attirer des investissements directs étrangers en Haïti. Mais où sont les supports et la facilitation pour les investisseurs locaux? Alors qu’ il n’est un secret pour personne, les investisseurs étrangers sont plus hésitants, réticents et même trop incertains. Donc on ne peut pas se permettre de capitaliser totalement sur ces investissements directs étrangers, qui n’arrivent pas nécessairement dans le pays. D’ailleurs le rapport de la Commission Economique de l’ONU pour l’Amérique Latine et la Caraïbe (CEPAL) du décembre dernier a fait état d’une baisse des IDE en Haïti, pour passer de 179 millions en 2012 a 119 millions en 2013.

A l’opposé, tout près de nous, en Jamaïque, l’agence de promotion d’investissement, qui s’appelle Jamaican Promotion corporation (JAMPRO) travaille en étroite collaboration avec des entrepreneurs locaux et mondiaux qui cherchent à exploiter les nombreuses opportunités d’investissement et de commerce de la Jamaïque. Cette structure facilite les investissements directs locaux et étrangers et guide les investisseurs à travers les processus nécessaires et offre un soutien en partenariat avec les organismes et les ministères clés du gouvernement. Pour dire à quel niveau cette agence est impliquée dans la promotion et le support de l’investissement local.

Un autre aspect de la question, il est visible que le CFI se transforme presqu’essentiellement en une plateforme d’information. Les informations sur le climat des affaires, sur l’économie ou sur les exigences pour l’enregistrement d’une entreprise. L’information est donc capitale, elle ne suffit pas. Un meilleur accompagnement s’avère nécessaire. Sinon « faciliter » serait juste une prétention.

Nos voisins, l’ont compris parfaitement, ainsi le Centre d’Exportation et d’Investissement de la République Dominicaine (CEI-RD) offre une gamme de support technique et de conseil principalement pour le lancement d’une activité économique, pour la préparation à l’exportation et la compétitivité dont un service de conseils juridiques personnalisés et des incitatives tels les programmes de préférence pour PME.

Qu’en est-il de la Jamaïque?

Son agence de promotion des investissement le JAMPRO offre des formations sur le renforcement des capacités des entreprises, aide à l’enregistrement des exportateurs, aide les entrepreneurs à réaliser une étude de marché et élaborer un plan d’affaires. Le centre de promotion de la Jamaïque facilite l’accès aux programmes de soutien technique et au financement et enfin construit le lien entre les fournisseurs, les entrepreneurs et les différents prestataires de services.

La solution n’est pas dans une nouvelle personne, mais de préférence dans l’orientation qu’on doit donner à ce centre et les activités qu’il doit mener. A rappeler que le CFI est membre de l’Association des Caraïbes des organismes de promotion (CAIPA) avec 19 autres organismes de promotion de la région. La plupart d’entre ces organismes régionaux ont réussi effectivement à faciliter des investissements durant ces dernières années, comme c’est le cas pour le Centre d’Exportation et d’Investissement de la RD, Jamaican Promotion Corporation (JAMPRO) ainsi que Invest Barbados de la Barbade, et tant d’autres encore, qui constituent de vrais exemples pour les autorités haïtiennes si on veut avoir de meilleurs résultats.

Le CFI doit de toute façon, s’ouvrir aux investisseurs locaux, et cesser de jouer un rôle réduit de centre d’information pour les investissements, mais de préférence un centre actif, qui s’implique de manière effective dans le processus de montage d’entreprise, développement d’entreprise, l’implantation d’industries ou entreprises de services, locales ou étrangères, et disposant d’un vrai programme d’accompagnement de proximité dans la démarche d’exportations. Sinon, on aura encore à nommer de nouveaux directeurs tous les deux ans, pour des résultats mitigés. Il faut définitivement une autre orientation pour avoir d’autres résultats.

CHIFFRE DU JOUR: 118 millions

Les investissements directs étrangers vers Haïti étaient de 179 millions de dollars en 2012, selon un rapport de la CEPAL. Contre 2,3 milliards de dollars pou Trinidad and Tobago. Donc, ce pays qui est 5 fois plus petit qu’Haïti a reçu 13 fois plus d’investissement directs étrangers qu’Haïti.


Etzer S. Emile, MBA
Directeur-Adjoint à l’Assistance Technique
Centre d’Entrepreneuriat et d’Innovation (CEI)
Professeur à la Faculté des Sciences Economiques et Administratives
Université Quisqueya
(509) 34 02 00 03 / 37 81 85 30
etzer.emile@uniq.edu.ht
218, Ave. Jean Paul II, Haut de Turgeau, HT6113, Port-au-Prince, Haïti

Une pensée sur “La réorientation du Centre de Facilitation des Investissements devient nécessaire

  • 21 février 2014 à 8:02
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    Tres bon article, Etzer. Il faut accompagner et rechercher des investissements locaux aussi. Je ne saurais ne pas etre d’accord a ce niveau. Un nouveau leardership au sein de CFI peut s’averer important aussi, dans la mesure ou ce dernier arrive a y implanter une politique reelle ( liee a la realite). Cependant, qu’on se le tienne pour dit, le CFI s’inscrit dans une logique et une vision gourernementale. Elle ( l’institution) ne pourra pas se demarquer de cette politique de « Haiti is Open Business ». D’ou son « focus » exagere sur des investissements etrangers. J’ai bien deguste cette petite comparaison entre Trinidad et Haiti en guise de conclusion a l’article. Cependant, l’on sait pertinemment que les investissements directs etrangers n’ont rien a voir avec la dimension demographique ou geographique d’un pays. en tout cas , c’est pas l’aspect le plus important. J’ai hate de lire un autre article sur les conditions pre-existentielles des investissements etrangers. A bientot 朋友~!

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