Quand des écoliers fêtent la Noël aux portes de Village-de-Dieu
Des élèves de l’école primaire Albert II de Monaco ont fêté la Noël aux portes de Village-de-Dieu. L’écho des rires a momentanément remplacé celui de rafales d’armes automatiques dans cette partie du Bicentenaire. Rester au plus près de ces quartiers difficiles pour soigner, éduquer et offrir des opportunités économiques est un impératif, un pari pris pour assurer la mobilité sociale des enfants de ce quartier, soutient le Dr Jean William Pape.
Mardi 21 décembre 2021. Presque en face de Village-de-Dieu, dans le complexe abritant les Centres Gheskio, à l’angle de la rue Charéron et du boulevard Harry Truman, il y a des échos d’une fanfare et des rires d’écoliers – 350- de l’école primaire Albert II de Monaco. On fête la Noël, sous un ciel dont les nuances de bleu pourraient étonner Yves Klein, s’il était encore dans ce monde. Encadrés par leurs enseignants et par le Dr Marie Marcelle Deschamps, responsable de l’école, ces enfants, bonnet rouge, t-shirt blanc, basket, beaux comme des lutins, ont défilé au son de la musique.
Des étoiles dans les yeux, à côté d’un père Noël longiligne (les temps sont durs, même le père Noël a maigri) et d’un petit sapin garni de cadeaux, ces écoliers, garçons et filles, ont croqué un petit instant de bonheur simple dans leur établissement, au Bicentenaire, quartier où les journées sont ponctuées de rafales d’armes automatiques, de pleurs, de girophares de police et parfois du silence de la peur, comme celui imposé à ces morts donnés au feu et à la terre sans cérémonie dans ces quartiers du bord de mer de Port-au-Prince.
Rester au plus près de ces quartiers difficiles pour soigner, éduquer et offrir des opportunités économiques est un impératif, un pari pris pour assurer la mobilité sociale de ces enfants, a revendiqué le Dr Jean William Pape, responsable des centres Gheskio.
« Le pari dans l’éducation est un impératif pour l’Haïti de demain. L’avenir de notre pays ce n’est plus nous, c’est cette jeunesse qui est malheureusement délaissée. Il y a probablement parmi nos enfants de l’école Prince Albert II de Monaco un Albert Einstein, une Emmelie Prophète ou un Michel Soukar qui sommeille. À nous de leur donner la chance de s’épanouir ! », a-t-il confié au Nouvelliste.
« On ne peut pas vouloir faire avancer notre pays sans accorder une attention particulière à la population qui vit dans les bidonvilles dans des conditions indignes d’un être humain. On doit leur donner une opportunité de sortir de cet enfer pour devenir de vrais citoyens à part entière! », a affirmé le Dr Jean William Pape.
« Sans un investissement dans les bidonvilles dans les piliers du développement (santé, éducation et opportunités économiques) on ne pourra pas faire avancer notre pays. C’est le meilleur moyen d’offrir la mobilité sociale, de garantir l’harmonie et l’équilibre de la société », a souligné le Dr Pape, qui a salué les contributions du prince Albert II de Monaco.
« L’école primaire Prince Albert II de Monaco, avec un effectif de 350 élèves, a été construite après le tremblement de terre à la suite d’une visite du Collectif de Monaco, délégué par la principauté, désireuse de vouloir participer à la reconstruction du pays à travers les centres Gheskio. L’école a été construite et est parrainée par Monaco. Le Dr Marie Marcelle Deschamps a pris dès le début ce projet à cœur et s’en occupe de façon spéciale », a expliqué cet éminent chercheur haïtien, fier de la performance des élèves.
« Les élèves ont passé tous les examens officiels et on a même eu des lauréats », a expliqué le Dr Pape, qui a révélé avoir offert « environ 2 000 bourses d’études dans d’autres écoles du pays ».
Soucieux d’évoquer les centres Ghekios dans toute leur diversité, le Dr Pape est revenu sur sa philosophie et ses actions. « Nous pratiquons la santé globale à travers les trois piliers du développement : santé, éducation et opportunités économiques. Nous avons aussi une école vocationnelle avec plusieurs filières : couture, peinture, papier mâché, sculpture, boiserie. C’est le seul endroit en Haïti où les femmes travaillent le bois avec une grande maîtrise », a détaillé le Dr Jean William Pape.
« Nous offrons aussi le microcrédit à travers ACME, supporté par la Fondation Mérieux. Nous avons aussi une usine de chlore offerte par les CDC des États-Unis au début de l’épidémie de choléra qui peut fournir de l’eau potable à 100 000 familles.
Nous travaillons pour la communauté et avec la communauté avec le support de plusieurs partenaires (FNUAP, UNICEF, Pepfar, Fonds mondial, Fondation Mérieux) », a révélé le Dr Jean William Pape, qui croit dans l’effort, pour les communautés difficiles, d’être au plus près des communautés difficiles.