Villes mortes, alternatives politiques et tentation pour plus de violence
Les deux jours de grève générale lundi et mardi ont fortement paralysé les activités dans les principales villes du pays. Les écoles, l’administration publique, les entreprises privées sont restées fermées à Port-au-Prince, au Cap-Haïtien, aux Cayes, à Miragâone et dans d’autres villes du pays. Les correspondants de plusieurs médias de la capitale ont signalé des obstructions d’artères stratégiques, des jets de pierres, de bouteilles et des coups de feu un peu partout à travers le pays. La colère, observée lors des manifestations du 18 novembre, émaillées d’actes de violence, de morts et de blessés par balle, ne s’est pas estompée pendant ces jours de grève pour exiger le départ du président Jovenel Moïse et le procès des dilapidateurs présumés des fonds PetroCaribe.
L’une des figures de l’opposition, chef de Pitit Dessalines, ex-sénateur et candidat malheureux à la dernière présidentielle, Moïse Jean Charles, a appelé à la poursuite de la mobilisation populaire jusqu’au renversement du président Jovenel Moïse. Pour Moïse Jean Charles, le remplaçant de Jovenel Moïse doit être un juge de la cour de cassation, pas un juge adoubé à un sénateur. Il voit à la place du Premier ministre Jean Henry Céant un autre chef de gouvernement « issue du peuple ». Cette personnalité, a expliqué Moïse Jean Charles, doit être « crédible ». Il doit « inspirer confiance au peuple » dans sa mission de lutter contre la misère dans le pays. L’ex-sénateur Moïse Jean Charles a indiqué que la mission principale de Pitit Dessalines est d’amener le pays aux Etats généraux. Il a estimé qu’un premier pas été fait avec le drapeau noir et rouge hissé à Vertière avant le 18 novembre. Moïse Jean Charles, a annoncé qu’il laisse le pays pour les Etats-Unis où il doit s’entretenir avec des fonctionnaires de l’ONU sur la situation politique du pays, a rapporté le correspondant au Cap Haitien de radio Vision 2000 qui a indiqué que 9 personnes ont été blessées par balles et 8 autres à l’arme blanche, selon le bilan communiqué par l’hôpital universitaire de la ville.
Aux Cayes, la troisième ville du pays, des vidéos d’accrochages et de coups de feu tirés par des policiers de l’UDMO ont inondé la toile. La situation sécuritaire ne s’est pas améliorée. Le dépôt d’un supermarché non loin de carrefour Quatre Chemins a été attaqué et pillé. Il y a des voleurs dans les rangs des manifestants, a déploré un citoyen de la ville qui répondait en direct aux questions des présentatrices du journal de 5 heures p.m. de radio Vision 2000.
A Port-au-Prince, tôt dans la matinée, la circulation a été invisible. Le gros et le petit commerce ont trinqué. Des gagne-petits incapables de tenir financièrement ont sondé des rues vides. En milieu de journée, au Canapé-Vert, à Pétion-Ville, les rares camionnettes visibles au petit matin se sont garées. Non loin de l’ancien cimetière, une manifestation de quelques dizaines de personnes a été observée par un reporter du Nouvelliste.
Au plan politique, l’annonce du président Jovenel Moïse de « poursuivre » le dialogue, d’agir pour rétablir la sécurité et mettre en place des programmes sociaux n’a pas été attrapé au vol.
Pour les principales figures de l’opposition, le président Jovenel Moïse appartient au passé. Au présent, en revanche, c’est l’armement, la tenue des agents de l’USGPN, ceux placés dans le dos du chef de la police, Michel-Ange Gédéon, qui a fait couler beaucoup de salive dans un contexte où l’opposition politique n’en finit pas de dénoncer des morts dans ses rangs et la présence d’escadrons de la mort mis en place par le régime. Le chef de la police qui a indiqué, sur radio Caraïbes, ne pas être au courant de la dotation d’équipements roulant, d’armes dont des mitrailleuses M 60 a tapé du poing sur la table. Michel-Ange Gédéon a mis hors jeu les éléments de l’USGPN dans la prise en charge des manifestations, des opérations de maintien d’ordre.
Sur Vision 2000, si Jude Charles Faustin, conseiller au palais national a estimé que cela n’a rien d’anormale et que c’est le secrétaire général du palais qui s’occupe en général de tout ce qui est logistique pour la sécurité présidentielle, l’ex-ministre la justice, Paul Denis a estimé que « c’est une situation extrêmement grave qui peut déboucher sur une catastrophe ». « Il faut mettre de l’ordre dans cette situation », a poursuivi Paul Denis, soulignant que la population doit savoir et connaitre sans difficultés les policiers appelés à la protéger. « On n’est pas loin de dire que des zenglendos, des attachés sont dans les rues. La déclaration du directeur général de la police, à mon avis, interpelle directement le président de la République et le président a une réponse à donner. Au niveau du Conseil supérieur de la police nationale d’Haïti, en discussion avec le Premier ministre, il y a de l’ordre à mettre dans ce désordre. C’est un bordel. Cela ne peut donner des résultats attendus par des citoyens.