Haïti – Économie: Placer l’agriculture au cœur de la stratégie de croissance : différence entre le dire et le faire
En marge d’un atelier sur les orientations du budget cette semaine à Pétion-Ville, le ministre de l’Economie et des Finances, Wilson Laleau a dévoilé les stratégies budgétaires à appliquer pour arriver à la croissance souhaitée. Il a affirmé que le gouvernement a placé l’agriculture au cœur de la stratégie de croissance. Un choix qui devrait être optimal vu que ce secteur représente près d’un quart du PIB haïtien. Mais il n’y a t-il pas un grand écart entre le dire et le faire, lorsqu’on analyse les résultats au niveau de ce secteur durant ces dernières années?
Le ministre de l’Economie et des Finances pour le nouveau budget à venir veut atteindre des objectifs clés afin de maximiser l’impact des dépenses et améliorer les conditions de vie actuelle de la population. « C’était important de trouver un secteur stratégique dans l’économie. L’agriculture est le seul secteur qui puisse nous permettre de résoudre le plus de problèmes possibles et le plus vite possible. Cependant, elle doit bénéficier des apports des autres secteurs », a expliqué le ministre. « Quand on a tout comme priorité, ça veut dire qu’on n’a pas de priorité », a-t- il ajouté.
« Un budget, c’est un instrument qui permet à l’Etat de concrétiser ses politiques publiques. Il est la synthèse de toutes les décisions qui sont prises par l’ensemble des secteurs, lesquelles décisions sont mises en cohérence pour porter un objectif collectif», a poursuivi le ministre de l’Economie et des Finances. Mais en réalité, l’agriculture est toujours traitée en parent pauvre et n’a toujours pas le support souhaité, le support promis.
Pour le prochain budget, le ministère de l’Economie fixe des objectifs de croissance à atteindre et veut miser sur l’agriculture. On espère donc que le budget de ce secteur puisse être révisé à la hausse pour rapprocher le dire et le faire si on veut effectivement arriver à la relance agricole pour la croissance et pour la réduction de la pauvreté. Mais, il ne suffit pas d’augmenter le budget, il est important de mettre en exécution des stratégies sérieuses à impact durable dans ce secteur et arriver à investir davantage pour une agriculture forte avec notamment une lutte véritable contre la corruption dans ce secteur.
Il faut aussi s’assurer que les fonds de ce budget vont être effectivement alloués à des actions productives et non pas pour la distribution a titre de subvention ou commission à des amis, familles et proches. Le scandale de cette semaine impliquant le ministre Dorcin en est une preuve. Enfin, il faut arriver à une meilleure coordination des actions car très souvent plusieurs acteurs interviennent dans le secteur et ne s’entendent pas sur les priorités et ne s’accordent pas mais essaient de préférence de réaliser des petites actions isolées pour la visibilité et non pour pas pour de l’impact. Bref. Entre temps, la relance agricole est à la traine, l’importation des produits étrangers augmente, et de plus en plus de gens laissent les provinces pour des activités de survie dans les villes notamment à Port au-Prince. Parallèlement, on risque de perdre 60% de la production de cette année avec la sécheresse qui s’abat sur plusieurs départements, sans même parler des impacts négatifs éventuels de la période cyclonique qui s’approche sur l’insécurité alimentaire et la pauvreté.
Pour le pays, Pour l’agriculture, il est temps de rapprocher le dire et le faire, pour le bien du peuple haïtien et l’économie en générale.
Etzer S. EMILE, M.B.A
Economiste
Radio Vision 2000