Haïti – Économie: Révision à la baisse probable des prix à la pompe et ses éventuelles conséquences

Depuis quelques jours, des syndicats sont en train de faire pression sur le Ministère de l’Economie et des Finances pour obtenir une révision à la baisse des prix à la pompe dans ce contexte de dégringolade des prix du baril de pétrole sur le marché international.

 

A cet effet, le ministre de l’Economie et des Finances  a rencontre le Front national des syndicats haïtiens (FNSH) le mercredi 29 janvier. Cette organisation exige au gouvernement de refixer les prix des produits pétroliers tel qu’ils ont été avant leur augmentation en octobre dernier, a informé  le coordonnateur général du FNSH, Montès Joseph.

 

Le ministre a également reçu cette semaine les syndicalistes du Secteur Transport Terrestre Haïtien (STTH), en vue de définir un cadre de travail sur le fonctionnement du système de transport et les mécanismes à mettre en place en vue de le moderniser. Rappelons que vendredi dernier, l’Association des Propriétaires et Chauffeurs d’Haïti (APCH) a lancé un ultimatum de 8 jours au Gouvernement pour qu’il procède à une baisse des prix des produits pétroliers sur le territoire national, sinon, l’APCH menace d’entamer une grève illimitée dans le transport public, jusqu’à obtenir satisfaction de ses revendications.

Selon le coordonnateur de FNSH, Montès Joseph, le ministre Wilson Laleau, aurait donné la garantie que le gouvernement  va faire retrait sur la dernière mesure prise en octobre 2014 pour augmenter les prix du carburant sur le marché national ou peut être c’est juste une option sur la table sans donner de grande garantie. Confusion.

Le ministre Laleau reconnait, cependant, toujours selon ce syndicaliste, que cette nouvelle mesure doit avoir des conséquences néfastes sur l’économie du pays et que l’Etat pourra faire face à d’énormes difficultés pour répondre à certaines exigences au niveau de l’administration publique.

Il faut bien comprendre la réalité, quand le prix du pétrole était élevé sur le marché international, tout au début de l’année dernière et même en 2013, le gouvernement ne voulant pas prendre des mesures impopulaires continuait à subventionner le carburant pour amortir le choc pour la population. A un certain moment, le gouvernement a réalisé que les pertes sont trop élevé, les manques à gagner sont devenus de plus en plus grandes, insupportable, dans le sens que cela affecte l’équilibre des finances publiques a décidé de réduire la subvention en révisant à la hausse le prix le 10 octobre 2014. On se rappelle le gallon de gazoline était passé de 200 à 215 gourdes. Mais dommage pour le gouvernement, le timing était mauvais, car ils ont révisé à la hausse à un moment ou le prix à l’international devait commencer à chuter, pour arriver à un niveau très bas aujourd’hui qui ne vaut même pas la moitié du prix de l’été dernier.  Ce qui envoie un mauvais signal à la population.

Une situation qui arrange un peu le gouvernement, car il est en mesure de réparer un peu les dégâts causes par les subventions antérieures. Les chiffres parlent de près de 19 milliards de gourdes de pertes au cours des 3 dernières années. Si le gouvernement maintient le prix actuel, il réduira un peu ses déficits et restera un peu cohérent avec ses prévisions de recettes dans le budget, et sera plus en mesure de faire face à ses dépenses de fonctionnement notamment. Mais si sous les pressions des syndicats et même la population, le ministère des finances décide effectivement de réviser les prix  la pompe à la baisse, les recettes publiques prendront un grand coup cette année, ce qui fera déséquilibrer davantage les comptes de l’Etat et rendre ce dernier plus incapable de faire face à ses obligations. Face à un déficit plus prononcé, il n’aura pas d’autre reflexe que de faire appel à la BRH pour du financement monétaire qui à son tour fera augmenter à la fois l’inflation et le taux de change. Donc, ce que les consommateurs gagnent de la baisse des prix à la pompe comme pouvoir d’achat peut ne pas être suffisant pour les aider à faire face à des prix plus élevés dans l’économie à moyen terme.

Bref, la décision peut être populaire et bien souhaitée par la population mais ferait peut être plus de mal à moyen et à long terme à l’économie. Cependant pour des raisons politiques, le gouvernement va probablement céder et creuser davantage le trou qui nous attend et faire augmenter nos déficits et nos dettes. Tout ceci est la conséquence de mauvaises gestions au niveau des finances publiques haïtiennes depuis des années qui n’étaient pas au diapason avec les nouvelles exigences de l’économie mondiale, notamment les développements dans le marché pétrolier.

 

Etzer S. Emile, M.B.A

Economiste

Radio Vision 2000

etzeremile@gmail.com

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