Haïti – Économie: L’importance des données dans la lutte contre l’extrême pauvreté

Alors que la Banque mondiale s’est fixé un double objectif de mettre fin à l’extrême pauvreté et de promouvoir une prospérité partagée d’ici 2030, un nouveau rapport de cette banque paru cette semaine souligne la nécessité de disposer des données de référence nécessaires et d’instruments de mesure adéquats. Pour cela, il est indispensable pour les pays de renforcer les systèmes de gestion des données au niveau national et de recueillir ces données de façon plus fréquente.

Selon le rapport il est urgent d’améliorer la collecte des données d’enquêtes relatives à la consommation et au revenu des ménages afin de pouvoir disposer de données régulières, de meilleure qualité et comparables.

Le rapport souligne également l’importance de données complémentaires comme les taux de croissance démographique et les indices de parité de pouvoir d’achat, très utiles pour l’établissement de comparaisons entre pays. Cependant, l’objectif principal de la collecte de données sur l’extrême pauvreté et sur le partage de la prospérité reste avant tout de renseigner les politiques nationales.

En effet selon la Banque Mondiale, des progrès notables ont été accomplis, au cours des dernières décennies, dans la réduction de la pauvreté à l’échelle mondiale. Entre 1990 et 2011, le nombre des personnes vivant dans l’extrême pauvreté a été réduit de moitié. Il se chiffre aujourd’hui à environ un milliard d’individus, soit 14,5 % de la population mondiale. Afin d’estimer le nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté, la Banque mondiale utilise actuellement un seuil de pauvreté fixé à 1,25 dollar par jour (sur la base des prix de 2005). Les auteurs du rapport estiment qu’il est possible de se fixer comme objectif de réduire à 3 % la proportion de la population mondiale vivant en-dessous de ce seuil de pauvreté, mais que c’est là un objectif extrêmement ambitieux.

Les crises économiques et financières d’une portée exceptionnelle, les conflits, l’instabilité politique et la fragilité, ou encore le changement climatique et les épidémies mondiales sont autant de facteurs qui viennent aggraver ces incertitudes. Ainsi, l’épidémie d’Ebola, qui ne faisait que s’annoncer au moment de l’achèvement du rapport, menace aujourd’hui de constituer le genre de facteur de risque évoqué dans l’analyse.

Malgré ces risques et défis, les pays doivent s’atteler à travailler pour combattre l’extrême pauvreté, et cela doit passer d’abord par des statistiques régulières et adaptées. Prenons par exemple, l’indicateur de partage de prospérité. Contrairement au taux de croissance du PIB par habitant, que l’on obtient en se basant sur les données des comptes nationaux, l’indicateur de partage de la prospérité est tiré de données d’enquête sur les ménages.

Lorsque la croissance est largement partagée et qu’elle augmente le rendement des actifs détenus par les pauvres, c’est alors que sont réunies les meilleures chances d’obtenir une réduction efficace de la pauvreté et le partage de la prospérité. L’amélioration de l’accès à l’éducation, à la santé et aux capitaux est au nombre des facteurs propres à déterminer une meilleure rentabilité des actifs détenus par les pauvres.

Donc encore une fois, comme nous le disons toujours dans notre chronique, la disponibilité de statistiques, de données économiques, sociales sont d’une importance capitale pour la prise de décision au niveau des politiques publiques, quand nous voulons apporter les réponses appropriées, quand nous voulons être précis dans la manière nous devons approcher les réalités. Bref, les données, dans la façon qu’elles sont collectées ou mesurées, constituent un outil clef dans la lutte contre la pauvreté.

Cependant, il n’est pas un secret pour personne qu’Haïti à un grand déficit à ce niveau. Et c’est absurde de croire que nous pouvons faire de l’opérationnel sans d’abord disposer des informations, des données dans la recherche de solutions stratégique pour le développement de ce pays. L’IHSI, le Ministère des Affaires Sociales et du Travail, le Ministère de l’Economie et des Finances, le Ministère du Commerce et de l’Industrie, la BRH, le Ministère de la Planification à travers ONPES, aussi bien que les universités, d’autres organisations de la société,  doivent non seulement produire plus de données, mais surtout les publier, et ceci régulièrement. Il est inconcevable que le ministère des affaires sociales et du travail et le MEF par exemple ne disposent pas de données officielles sur la population haïtienne en situation de chômage ou du moins le nombre d’emplois crée dans l’économie sur une base régulière. Cette déficience en statistiques de base est des plus dommageable pour l’économie et le bien être des citoyens. Donc, penser croissance économique, penser développement, c’est d’abord penser à développer une culture de données pour arriver à une disponibilité de statistiques nationales fiables à tous les niveaux et sur une base régulière.

 

Etzer Emile, M.B.A

Economiste

Radio Vision 2000

etzeremile@gmail.com

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