Haïti-Coopération Internationale: Donner pour Haïti, mais pas n’importe quoi
Grandes agences, gouvernements, ONG, associations locales ou internationales… Dans les projets humanitaires menés en Haïti, il y a de nombreux acteurs pour des projets de différentes ampleurs. Ce qui est certain c’est que l’on voit de tout: du très bon, comme du très mauvais. Et dans le plus mauvais, il y a certaines actions de don. De quoi s’agit-il?
Un premier exemple significatif, des cartons pleins de livres destinés aux écoles du pays, dont l’histoire est celle d’un jeune Somalien qui fuit son pays pour le Wisconsin, et doit s’acclimater à une nouvelle culture, un nouveau climat,… La couverture du livre illustre très bien cette histoire (cf photo) L’enfant haïtien devra donc composer avec cette histoire qui lui demande de s’identifier à un Somalien, car bien entendu, il est évident qu’il connaît très bien la situation du pays qu’il sait même identifier sur une carte, et peut donc faire le rapprochement avec la situation matérielle d’Haïti. Le message qui lui parvient de ce support pédagogique est clair : l’immigration est un choix tout à fait envisageable et malgré des difficultés au commencement, finalement mineures (trouver un manteau), il parviendra à se faire accepter de ses camarades ouverts à l’intégration.
Un deuxième exemple, ces ordinateurs vus sur un site de formation d’enseignants, où l’on retrouve collé sur chaque terminal le doux nom du programme ayant équipé une des salle en matériels informatiques : « Food for the poor » (« nourriture pour les pauvres »).
L’informatique nourrit, donc. Les élèves haïtiens évoluent dans ce patchwork de matériel donné et estampillé, leur rappelant chaque jour la misère environnante et l’incapacité de leur Etat à leur proposer des conditions d’enseignement de base : les tables Unicef, les cahiers bidule, les cartables machintruc, les tableaux numériques « Sankoré » sous titré « programme pour l’Afrique », et les ordinateurs dotés d’un nom affligeant.
Par conséquent, Haïti est suffisamment dotée d’équipements inutiles, sans avoir à en rajouter avec les dons de petits matériels que les personnes envoyées en mission apportent dans leurs valises après avoir fait le tri dans la chambre des enfants. A croire qu’Haïti est la petite sœur à qui on donne ses anciens vêtements dont on n’a plus besoin. Sauf que l’on ne songerait pas à vêtir sa petite sœur de vêtements trop usagés. Certains pourtant ont pu envoyer des sacs de crayons de couleurs déjà bien taillés, des peluches poussiéreuses ou encore des morceaux de laine pour… non, je ne vois toujours pas pourquoi. « Ma structure a fait le tri dans ses archives, j’apporte donc des livres pédagogiques trop anciens qu’on allait détruire ». Cela se passe même de commentaires,… Haïti est ensevelie sous ses déchets à ce jour toujours non triés et détruits, mais cela n’empêche pas certains d’en envoyer d’autres.
Certes, parfois, on veut juste bien faire, être généreux. Une des question à se poser alors est la suivante: mes bouts de crayons vont-ils contenter une classe entière, sachant que la moyenne par classe avoisine les 50 à 60 élèves, avec des pics à plus de 100? Quid des classes voisines où les élèves regarderont leurs camarades jouer avec leur «nouvelle» acquisition? L’autre question étant «Est-ce que je réponds à un réel besoin, sans créer de précédent?», mais ça, beaucoup l’oublient, ici en Haïti. (http://haiti.blogs.liberation.fr)