Monde/Climat-Réchauffement de la Planète : 190 pays à Doha pour lancer l’acte II de Kyoto
Confrontés aux signaux du réchauffement toujours plus nombreux et aux appels urgents à muscler leur action, quelque 190 pays se retrouvent ce lundi à Doha pour faire progresser les difficiles négociations pour sauver le climat, et notamment lancer l’acte II du Protocole de Kyoto.
«Il est nécessaire d’apporter une réponse plus rapide au changement climatique, et c’est possible», a déclaré la responsable climat de l’ONU, Christiana Figueres, quelques jours avant la grande conférence annuelle. Et «à Doha, il faut s’assurer que l’on passe à la vitesse supérieure», a-t-elle poursuivi. La conférence se tiendra du 26 novembre au 7 décembre.
Le 4, les négociateurs seront rejoints par plus de 100 ministres censés conclure un accord, nouvelle étape dans le laborieux processus de négociations onusiennes lancé en 1995. Les cris d’alerte se sont multipliés ces derniers jours : la Banque mondiale a mis en garde contre un réchauffement de 4°C dès 2O60 et «la cascade de cataclysmes» qui frapperaient les pays pauvres. La teneur de l’atmosphère en gaz à effet de serre (GES) a atteint un nouveau pic en 2011, et l’ONU a fait savoir que les efforts de la communauté internationale pour contenir le réchauffement à 2°C étaient encore plus loin du compte qu’on ne l’avait évalué. L’objectif de 2°C, fixé par la communauté internationale, est le seuil au-delà duquel le système climatique risquerait de s’emballer, avec des effets incontrôlables qui accéléreraient encore fortement le réchauffement. L’un des gros dossiers en discussion à Doha sera l’acte II du protocole de Kyoto, le seul instrument légalement contraignant qui engage les pays industrialisés, à l’exception notable des États-Unis qui ne l’ont jamais ratifié, à réduire leurs émissions de GES.
Décision symbolique
«Le principe d’une seconde période d’engagement après 2012 a été acquis à Durban», dernière conférence de l’ONU sur le climat fin 2011, et «maintenant, il faut trancher» sur la durée de Kyoto 2, les objectifs chiffrés…, résume à l’AFP un négociateur européen. Il s’agit avant tout d’une décision symbolique. Avec le retrait du Canada, du Japon et de la Russie, Kyoto 2 ne devrait concerner essentiellement que l’UE et l’Australie, soit 15% des émissions de GES globales. «C’est un instrument qui ne changera pas grand-chose dans le monde réel, mais sa prolongation est importante pour contrer la dynamique, toujours très mauvaise, de méfiance» des pays du Sud vis-à-vis de ceux du Nord, explique le négociateur.
Un accord global et bien plus ambitieux, impliquant cette fois tous les pays, dont les deux plus grands pollueurs de la planète que sont la Chine et les États-Unis, doit être signé en 2015 pour entrer en vigueur en 2020.
Le débat sur la forme légale de cet accord et la répartition «équitable» des efforts devrait démarrer à Doha. Mais les pays du Sud, et notamment les petites îles, particulièrement vulnérables à la montée du niveau des mers, ne veulent pas attendre encore huit ans, et appellent à prendre des engagements plus forts dès maintenant. «C’est absolument essentiel. Le temps n’est clairement pas de notre côté», a déclaré à l’AFP la représentante de l’Alliance des petits États insulaires (Aosis), Marlene Moses. «J’ai l’espoir que l’expérience tragique de l’ouragan Sandy, par exemple, amène les pays les plus réticents dans ces négociations à s’engager pleinement dans cet effort», a-t-elle ajouté.
À peine réélu, le président américain Barack Obama a promis de s’engager rapidement pour «voir ce que nous pouvons faire de plus, à court terme, pour réduire les émissions de carbone». Mais la composition du Congrès laisse présager peu de marge de manœuvre pour des mesures drastiques sur cette question.
L’engagement des États encore plus loin du compte qu’on ne le pensait
Les intentions affichées de la communauté internationale pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre sont encore plus loin du compte qu’on ne le pensait, pour contenir le réchauffement climatique à 2°, s’est inquiétée l’ONU dans un rapport. Pour parvenir à cet objectif, il faudrait ne plus émettre que 44 gigatonnes (Gt) équivalent CO2 en 2020 dans l’atmosphère, contre environ 50 Gt par an aujourd’hui, rappelle le Programme des Nations unies pour l’environnement (Pnue) dans son rapport. Or, même si les promesses les plus ambitieuses sont tenues, il manquera 8 Gt, soit deux Gigatonnes de plus qu’estimé dans son précédent rapport en 2011. «La transition vers une économie moins carbonée se fait beaucoup trop doucement, et les chances de parvenir» à une hausse maximale de 2°, «se réduit chaque année un peu plus», a averti Achim Steiner, directeur exécutif du Pnue.
Selon l’ONU, si aucune mesure d’urgence n’est prise, la hausse de la température moyenne de la planète au cours du siècle sera de 3 à 5°. Le niveau des émissions de gaz à effet de serre (GES) a augmenté de 20% depuis 2000, et doit être réduit de 14% pour atteindre les niveaux requis en 2020, précise le rapport. L’objectif de 2° que s’est fixé la communauté internationale est le seuil au-delà duquel, selon les scientifiques, le système climatique risquerait de s’emballer avec des effets qui accélèreraient fortement le réchauffement. Ce rapport, réalisé par 55 scientifiques de 20 pays, est présenté quelques jours avant l’ouverture du grand rendez-vous climat annuel, du 26 novembre au 7 décembre à Doha, durant lequel plus de 190 pays vont tenter de progresser dans la lutte contre le changement climatique. Un accord global est attendu en 2015 pour entrer en vigueur en 2020.
Repères
- Hausse moyenne de près de 1°C de la température mondiale depuis un siècle, montée du niveau de la mer, vagues de chaleur et inondations plus nombreuses : le changement climatique est en cours, nous rappelle la science, avec des effets qui vont s’accroître au fil des décennies.
- La température mondiale a augmenté de 0,74°C depuis un siècle, et devrait augmenter de 1,1 à 6,4°C par rapport à 1980-1999 d’ici 2100, selon le dernier rapport en date du Giec, l’organe scientifique de référence sur le climat, publié en 2007. Le prochain rapport est attendu en 2013 et 2014.
- Les efforts actuels de la communauté internationale pour limiter les émissions de gaz à effet de serre porteraient la trajectoire de 3 à 5°C, selon un dernier rapport du Programme des Nations unies pour l’environnement.
Source : http://www.lematin.ma
Image : http://www.total-manga.com