Lâché par plusieurs de ses proches, Jovenel Moïse s’accroche au référendum mis en question par le BINUH,
Après Liné Balthazar, conseiller du président de la République et président du PHTK, le parti au pouvoir, c’est maintenant l’ancien sénateur Gabriel Fortuné, ami personnel et supporteur de Jovenel Moïse, qui prend ses distances par rapport au référendum. L’ancien sénateur Jean-Hector Anacacis, qui avait son représentant au gouvernement de Jouthe, appelle aussi le président à entendre la voix de la raison. Parallèlement, Jovenel Moïse demande au Comité consultatif qui travaille sur le référendum de poursuive son travail…
« Le référendum est suicidaire pour l’avenir du pays. Il est impossible de réaliser le référendum le 27 juin prochain », a affirmé l’ancien sénateur Gabriel Fortuné, mandaté par Jovenel Moïse en 2018 pour dialoguer avec l’opposition en vue de trouver une sortie à la crise politique. « Les conditions ne sont pas réunies aujourd’hui pour doter le pays d’une nouvelle constitution », a-t-il indiqué. « Le référendum n’est pas possible. Il n’y a pas d’accord politique sur le dossier. On doit se mettre d’accord avant de changer la Constitution », a-t-il soutenu samedi dernier sur radio Magik9.
« Dans la Constitution en vigueur on ne parle pas de changement de Constitution, mais d’amendement et la Constitution dit comment le faire. Elle interdit le référendum », a dit l’ancien parlementaire, soulignant qu’on pourrait changer de Constitution dans le cas où les forces vives et les forces politiques du pays se mettaient d’accord sur le dossier.
Selon Gabriel Fortuné, pressenti comme Premier ministre il y a environ deux ans, le régime de Jovenel Moïse ne contrôle rien du tout. « Le pouvoir a perdu le contrôle de la situation », a-t-il dit.
L’ancien parlementaire soutient que le référendum n’est pas la priorité actuelle de la population. « La priorité de la population c’est la sécurité », a avancé Gabriel Fortuné.
Par sa part, l’ancien sénateur Jean-Hector Anacacis, coordonnateur de l’organisation politique LAPEH, qui était chargé de convaincre les acteurs de l’opposition à entrer en dialogue avec le président sur la crise politique, a lui aussi appelé Jovenel Moïse à entendre la voix de la raison en abandonnant son projet de référendum. LAPEH, a-t-il dit dans une note de presse, est pour une nouvelle constitution. « Mais cela ne doit pas être l’affaire d’un petit groupe. Il nous faut une entente nationale pour une nouvelle constitution capable de refonder la nation afin de satisfaire les revendications de la population », a-t-il dit.
« La coordination de LAPEH prend ses distances « ak referandòm de grenn gòch sa, epi mande otorite yo tande vwa pèp la ki bat chalbari dèyè konstitisyon fòfyèl sa a », a affirmé Jean-Hector Anacacis, qui avait son représentant au gouvernement de Jouthe, en l’occurrence Audin Fils Bernadel, remplacé à la tête du ministère de l’Intérieur par Gonzague Edner Day après la démission de Joseph Jouthe.
Jean-Hector Anacacis en a profité, dans la note, pour appeler les différentes confessions religieuses du pays à prier pour le président et l’opposition afin qu’ils puissent avoir de la sagesse.
Liné Balthazar, président du PHTK, le parti au pouvoir, avait déjà déclaré : « Nous exerçons deux activités depuis 200 ans: produire des Constitutions sur mesure pour faire plaisir à des secteurs et nous fixer des règles que nous refusons de respecter. C’est ce que nous faisons depuis 1801. Dans notre histoire, tous les initiateurs de nouvelle constitution l’ont fait à leur avantage ou contre quelqu’un d’autre. De 1801 à 1987. L’article 291 de la Constitution de 1987 a exclu les duvaliéristes durant 10 ans. »
Selon M. Balthazar, si le référendum avait lieu aujourd’hui, le PHTK aurait voté contre. « Trois raisons expliqueraient ce choix. Sur le plan technique et logistique cela aurait été un fiasco. De plus, il n’y a pas de consensus. Le PHTK n’a pas besoin d’une Constitution en faveur d’un groupe au détriment d’un autre. Par ailleurs, le texte proposé est une reproduction d’un modèle autoritaire de la Constitution de 1935 de Sténio Vincent. Dans l’ADN du PHTK il n’existe aucune velléité dictatoriale et autoritaire », argumente-t-il.
Sur le référendum, le Bureau intégré de l’ONU en Haïti (BINUH) avait déclaré : « A ce stade, le processus n’est pas suffisamment inclusif, participatif ou transparent. L’appropriation nationale du projet de constitution exige l’engagement d’un éventail plus large des acteurs politiques, sociétaux, y compris les groupes de femmes et de religieux dans tout le pays. »
Parallèlement, malgré ces prises de position, Jovenel Moïse continue de s’accrocher au référendum. « Mwen felisite manb CCI yo k ap fè yon gwo travay. Mwen di nou pa dekouraje, travay n ap fè a nòb anpil. Yon lòt fwa ankò m ap envite tout Ayisyen, sila yo k ap viv nan dyaspora a mete men pou ansanm nou bay Ayiti yon lòt konstitisyon, yon konstitisyon ki nan enterè tout moun », a-t-il dit samedi sur son compte Twitter.
Source: Le Nouveliste