OEA : Haïti reconnaît Juan Guaidó l’autoproclamé «président par intérim» du Venezuela
Sur demande des missions permanentes de l’Argentine, du Brésil, du Canada, du Chili, de la Colombie, du Costa Rica, des États-Unis et du Pérou, le Conseil permanent de l’Organisation des États américains (OEA) a tenu, le jeudi 24 janvier 2019, une séance extraordinaire en son siège à Washington afin d’examiner «les récents développements au Venezuela» 24 heures après la prestation de serment du président de l’Assemblée nationale du Venezuela, l’opposant Juan Guaidó, au poste de président par intérim de la nation sud-américaine.
« Je peux vous dire d’entrée de jeu qu’Haïti a effectivement sponsorisé la déclaration débattue aujourd’hui lors du conseil permanent extraordinaire tenu ce matin à la salle Simon Bolivar de l’OEA », a confié au Nouvelliste l’ambassadeur d’Haïti à l’OEA, Léon Charles.
La République d’Haïti fait donc partie des pays au nom desquels l’ambassadeur d’Argentine auprès de l’OEA, Paula María Bertol, a présenté ce jeudi la déclaration appuyant le président de l’Assemblée nationale du Venezuela, Juan Guaidó, en tant qu’actuel président vénézuélien par intérim. Argentine, Bahamas, Brésil, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Équateur, États-Unis, Honduras, Guatemala, Haïti, Panama, Paraguay, Pérou et République dominicaine, telle est la liste des pays à l’origine de cette déclaration qui réaffirme « le droit des peuples des Amériques à la démocratie et l’obligation de leurs gouvernements de la promouvoir et de la défendre, tel qu’énoncé à l’article 1 de la Charte démocratique interaméricaine ».
« Nous réaffirmons l’autorité constitutionnelle de l’Assemblée nationale du Venezuela, démocratiquement élue, et soutenons fermement les mesures prises pour encourager l’aide humanitaire internationale, la libération des prisonniers politiques, le gel des avoirs des fonctionnaires corrompus et pour fournir des garanties aux fonctionnaires civiles et militaires qui soutiennent l’Assemblée nationale dans le rétablissement de la démocratie et de l’État de droit au Venezuela », indique une partie du document.
Dans ce contexte, poursuit la déclaration, nous reconnaissons et exprimons notre plein soutien au Président de l’Assemblée nationale, Juan Guaidó, qui a assumé la présidence intérimaire de la République du Venezuela, conformément aux règles constitutionnelles et considérant l’illégitimité du régime de Nicolas Maduro.
« Nous avons réaffirmé l’illégitimité des élections présidentielles du 20 mai 2018 parce qu’elles n’avaient pas les garanties nécessaires pour en faire un processus libre, juste, transparent, légitime et crédible, respectant les normes minimales reconnues internationalement », soutiennent les pays auteurs de cette déclaration exigeant que la sécurité et la protection du président intérimaire Juan Guaidó soient garanties ainsi que celles des membres de l’Assemblée nationale.
Le secrétaire général de l’Organisation des États américains, Luis Almagro, via Twitter, apporte son soutien à la déclaration de l’OEA en faveur de Guaidó. « Je soutiens la déclaration des pays de l’OEA réaffirmant le droit illimité du peuple du Venezuela à la démocratie et en reconnaissance du président en charge Juan Guaidó », a déclaré Almagro, indiquant que l’une des priorités de l’OEA et du système interaméricain est de mettre fin à l’usurpation au Venezuela.
Dans une adresse depuis le siège permanent de l’OEA à Washington, Luis Almagro a répété que le président « usurpateur » et « illégitime » Nicolas Maduro doit partir pour éviter davantage de morts, davantage de souffrances au peuple vénézuélien. Et il a encouragé Guaidó à prendre les mesures nécessaires pour parvenir à une véritable démocratisation du Venezuela.
Le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo, présent à la session, a déclaré que le régime de Maduro était « illégitime » et « moralement en faillite » et que « ses actions sont invalides ». Il a réitéré le soutien de son pays à Guaidó et a demandé aux membres de l’OEA de s’aligner sur le droit du Venezuela à la démocratie. Il a assuré que les États-Unis étaient prêts à fournir des ressources au Venezuela afin de sortir de la grave crise économique.
Le groupe de Lima, composé de 14 pays – Argentine, Brésil, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Guatemala, Honduras, Mexique, Panama, Paraguay, Pérou, Guyana et Sainte-Lucie – a apporté son soutien à Juan Guaidó. A l’exception du Mexique.
Les Etats-Unis et leurs alliés dans la région ont également reconnu la légitimité du président du Parlement vénézuélien.
L’Union européenne a de son côté appelé à écouter la «voix» du peuple du Venezuela et a réclamé des élections «libres», sans suivre à ce stade les Etats-Unis.
En réaction, le président vénézuélien Nicolas Maduro a rompu les relations avec Washington, et a donné 72 heures aux diplomates américains pour quitter le pays.
Support à Maduro
D’autres pays, au contraire, comme le Mexique, le Nicaragua, le Cuba, la Bolivie et l’Uruguay ont rejeté l’auto-proclamation de l’opposant et réitéré que le seul président du Venezuela est Nicolás Maduro, élu démocratiquement. En se référant à la Charte démocratique interaméricaine, ces pays ont souligné que le principe de non-ingérence étrangère dans les processus internes de chaque pays et de respect de tous les États devait être respecté.
Parallèlement, le régime de Maduro peut également compter sur le soutien de ses principaux alliés internationaux, la Russie et la Chine, ainsi que d’importants partenaires extrarégionaux tels que la Syrie, l’Iran et la Turquie, tous ennemis de Washington.
Patrick Saint-Pré
Le Nouvelliste