Haïti – Élection: Réponse du bras technique de la CIEVE à l’analyse de la MOE-UE
Source Le Nouvelliste
La Mission d’observation électorale de l’Union européenne (MOE UE) a-t-elle contribué à maintenir l’intégrité du processus électoral haïtien de 2015 ?
1. Contexte d’agissement de la mission d’observation électorale de l’UE en Haïti
La Mission d’observation électorale de l’Union européenne (MOE-UE) a livré son analyse du rapport produit par la Commission indépendante de vérification et d’évaluation électorale (CIEVE) sur les élections de 2015. Et sans grande surprise, le verdict est sans appel : faiblesses factuelles et légales, faiblesses conceptuelles et méthodologiques sont les principales critiques adressées par la MOE-UE au rapport de la CIEVE. Bref, la MOE-UE a mis en œuvre toute l’étendue du savoir-faire électoral de ses « experts » pour tenter d’infirmer les conclusions du rapport de la CIEVE qui, rappelons-le, recommandent minimalement la reprise de l’élection présidentielle de 2015.
Avant d’entrer dans l’appréciation des arguments fournis par la MOE-UE, il y a lieu de souligner l’imposture et la forfaiture que charrie cette prise de position à travers laquelle la MOE-UE agit, non plus comme une mission d’observation qui doit préserver l’intégrité d’un processus électoral qu’elle a observé, mais plutôt comme un acteur politique intéressé et motivé. Au vrai, pour comprendre l’aveuglément partisan de la MOE-UE qui cherche désespérément à défendre ce bilan électoral lacunaire et médiocre, il faut se rappeler la première tentative indécente qu’avait initiée en décembre 2015 la MOE-UE pour infirmer les résultats de l’analyse d’un premier échantillon de 78 PVs (PVs) qui indiquaient, là encore, une absence totale de qualité dans le traitement des PV comptabilisés au niveau du Centre de tabulation.
En effet, lors d’un recours introduit au BCEN, en décembre dernier, par le parti Fanmi Lavalas et suivi par 2 autres partis politiques, dont le Parti Haïtien Tèt Kale (PHTK), un jugement du BCEN avait constaté, de manière transparente, que la totalité des 78 PVs évalués présentaient des problèmes d’irrégularités ou de fraudes, la MOE-UE avait produit une contre-expertise attestant qu’il n’y avait que 3 PVs qui présentaient des signes d’irrégularités. Les observateurs avisés n’avaient pas manqué à l’époque de relever l’opacité dans laquelle cette contre-expertise avait été conduite. Aucun observateur n’avait assisté aux travaux de la contre-expertise menée par la MOE-UE comme ce fut le cas avec l’échantillon des 78 PVS et aussi avec les travaux de la CIEVE.
Il est frappant de noter que les trois tentatives d’analyse des PVs conduites jusque-là ont débouché sur le même constat statistique d’un grand déficit de qualité mis au niveau du Centre de tabulation pour épurer le processus à travers l’application de critères objectifs fiables. Seule l’interprétation de ces résultats diffère selon le niveau d’accointance ou d’indépendance de ceux qui analysent ces résultats. Et c’est là qu’il est utile de comprendre pourquoi le Centre de tabulation reste un levier stratégique aux mains de ceux qui cherchent à manipuler les élections.
Ces faits suffisent à prouver que la MOE-UE agit dans le contexte électoral haïtien en qualité d’acteur politique motivé par des intérêts politiques et ayant des partis pris politiques nettement arrêtés en violation des principes universellement reconnus sur l’observation internationale d’élections .
Ainsi, on ne peut s’empêcher de relever dans le document d’analyse produit par la MOE-UE sur le rapport de la CIEVE l’écho tumultueux d’un hymne à l’ingérence rempli d’arrogance, d’insulte et de mépris vis-à-vis des droits du peuple haïtien.
2. Du vrai rôle des missions internationales d’observation électorale
Cette arrogance et ce mépris, teintés à la sauce d’une expertise à valeurs discriminantes promouvant une forme de démocratie restreinte pour les Haïtiens, sont d’autant plus flagrants qu’ils sortent du cadre fixé par la documentation internationale existante sur le vrai rôle des Missions d’observation électorale (MOE) .
Au vrai, les gens qui sont familiers des processus et des systèmes électoraux savent que le rôle des MOE consiste « à préserver la possibilité pour les électeurs de participer à des élections honnêtes et transparentes » (Godwinn-Gill, 1994). Ainsi, la seule légitimité des observateurs électoraux est de garantir l’intégrité du processus électoral à travers sa transparence. Cela suppose de la part des observateurs un comportement éthique, neutre et impartial. C’est ce que laisse croire du moins le « Guide pratique pour les observateurs d’élections » publié depuis 1996 par la Commission internationale des juristes.
Fort de ces standards formulés en 2005 par les Nations Unies dans la « déclaration de principes pour l’observation internationale d’élections », on est tenté de se demander si à un moment donné, lors des élections haïtiennes de 2015, la MOE de l’UE a pu faciliter le respect de ces principes qui visent l’intégrité électorale. Car il est dit dans ces principes que : « L’organisation d’élections honnêtes démocratiques est une expression de souveraineté qui appartient aux citoyens d’un pays. » En outre, on sait qu’« à la base de tout processus électoral intègre, honnête et transparent, il y a 3 normes élémentaires à garantir : un cadre législatif acceptable, une administration électorale neutre et un traitement équitable » de la part des administrateurs et des juges électoraux.
Sans refaire l’histoire du fiasco électoral de 2015 nous avons tous en mémoire les incohérences du décret électoral et les traitements empreints de partialité des juges du BCEN ou des conseillers électoraux qui ont permis…..lire la suite sur lenouvelliste.com