Haïti – Économie: A l’approche de la fin du 3ème trimestre, les perspectives économiques restent toujours très sombres

Les estimations pour des indicateurs clés de l’économie au cours de ce 3ème trimestre, qui prend fin dans exactement un mois, et les perspectives économiques pour le reste de l’exercice fiscal, qui termine dans exactement 4 mois, s’avèrent indubitablement très sombres, si l’on tient compte que les données n’ont pas changé de manière positive, tant sur l’échiquier politique que dans la sphère économique.

Si au cours du 2ème trimestre de l’exercice, c’est-à-dire de janvier à mars 2016, l’activité économique s’est contractée, d’une part du repli de la production industrielle et des échanges commerciaux et d’autre part, de la baisse de la production agricole dans le pays, cette situation devrait se poursuivre au cours du 3ème trimestre, car les données n’ont pas changé de manière positive. Au contraire, les incertitudes économiques et politiques se sont renforcées, les dépenses d’investissements sont en net repli en avril dernier (seulement 90 millions de gourdes contre 717 millions en janvier dernier) et les journées de manifestations qu’on a enregistrées pour le salaire minimum devraient affecter négativement la production totale au  niveau du secteur de la sous-traitance pour ce 3ème trimestre par rapport au 2ème trimestre.

D’un autre coté, le démarrage tardif de la saison pluvieuse et des périodes sèches enregistrées en septembre dernier ont eu des impacts négatifs sur la récolte du printemps (mars-mai), dont l’apport à la production agricole annuelle est de plus de 50 % et a été estimée à moins de 50 % de la  moyenne historique par la CNSA.

Les conséquences de ce repli de l’offre alimentaire local depuis quelques mois continuent de se faire sentir par cette accentuation des pressions inflationnistes dans l’économie, dont le taux est passé de 14.8% en mars à 15.2% en avril dernier.

D’un autre côté la décote de la monnaie nationale (la gourde) se poursuit et on se rapproche de près de 63 gourdes en moyenne pour 1 dollar américain, car l’offre de devises dans l’économie à travers notamment les exportations, les dons officiels et les investissements directs étrangers (IDE) est en nette régression au cours des 5 premiers mois de 2016 par rapport à la même période de 2015.

Au niveau du secteur externe, il faut rappeler que le déficit de la balance commerciale a crû de 10,6 % au deuxième trimestre par rapport au trimestre précédent, imputable à une augmentation de 3,22 % des importations conjuguée à une réduction des exportations, une tendance qui devrait se maintenir pour le 3ème trimestre. Les transferts privés de la diaspora qui financent nos exportations à hauteur de près de 50%, et qui sont toujours en hausse, à eux seuls ne peuvent pas combler cette forte pression sur la demande de dollars sur le marché. Donc il faut que les autres sources de devises jouent leur part, notamment les exportations et les IDE. Malheureusement nous ne sommes pas dans un contexte de stabilité où on peut vraiment espérer des initiatives de politiques publiques visant à booster nos exportations et faire venir des investissements de l’étranger.

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Depuis l’arrivée du Président provisoire Jocelerme Privert à la tête de l’Etat on a eu certes des efforts visant à assainir les finances publiques et réduire les déficits budgétaires, mais ces efforts sont très loin de garantir une meilleure croissance économique en 2016 par rapport à 2015 (1.7%), car le contexte politique s’avère beaucoup plus fragile cette année et on commence vraiment à ressentir les effets sur le plan économique.

Riphard Serent, MPA (Policy)

Economiste

riphardserent@gmail.com

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