Haïti – Économie: Une pérennisation de la crise politique en Haïti aggravera la situation économique et sociale

 

Tout le monde doit se préoccuper par cette crise politique et économique à laquelle confronte le pays depuis des mois, car la dégringolade  des indicateurs économiques ont des impacts directs sur chacun de nous, consommateurs ou agents économiques. Comme nous l’avons indiqué en début de semaine,  l’installation d’un nouveau président et la formation d’un gouvernement provisoire ne veulent pas dire que nous allons tout droit vers la stabilité ou encore vers des actions publiques en termes de politiques publiques pour pallier  cette situation économique difficile qui ronge le pays, car les préoccupations sont clairement beaucoup plus politiques qu’économiques.

En effet, depuis plusieurs années nous assistons à une récession continue des activités économiques dans le pays qui continue d’accoucher des pauvres Haïtiens et qui est la conséquence de ce mode de gouvernance politique et économique qui a été offert au pays durant ces dernières années. Cette situation a fait plonger la croissance économique du pays dont le taux est passé de 2.8% en 2014 à 1.7% en 2013. A coté des ces croissances décevantes nous avons aussi une inflation galopante qui continue de ronger le pouvoir d’achat mes ménages Haïtiens. Il faut dire que l’inflation a pratiquement doublé en 6 à 7 mois passant de 6.6% en mai 2015 à 12% novembre 2015. Maintenant on parle d’un taux de 12.5% qui devrait en principe continuer à augmenter sous l’effet de la dépréciation continue de la gourde.

Donc, contrairement au dernier rapport conjoint PAM/CNSA, ce n’est pas seulement la sécheresse de l’année dernière qui est responsable de ce doublement de l’insécurité alimentaire en Haïti ; il faut  tenir compte également de certains paramètres économiques, des soubresauts du marché ou du moins l’absence ou l’inefficacité des politiques publiques visant à garantir la stabilité des prix dans l’économie et créer des emplois durables. Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’il y a des pays de la Caraïbe comme les Bahamas et la Barbade qui vivent du tourisme et du commerce et qui ne produisent pratiquement rien en termes de biens agricoles et qui ne donnent pas lieu de parler d’insécurité alimentaire sévère  de temps à hautes comme c’est le cas en Haïti.

Donc, une pérennisation de la crise politique actuelle en Haïti ne fera qu’aggraver la situation économique et sociale du pays qui est déjà insupportable, notamment avec cette détérioration du pouvoir d’achat des ménages haïtiens et de la diminution de la valeur des épargnes ou des salaires libellés en gourdes. Par  exemple, quelqu’un qui avait une épargne de 1 million de gourdes en 2014 détenait environ $ 21,450US avec, à cette époque, 46.62 gourdes en moyenne pour 1 dollar américain. Arrivée à la fin de 2015 et au début de 2016 cette épargne de 1 million de gourdes s’est dépréciée d’environ 28% et ne vaut que $16, 666 US, avec un taux de 60 gourdes pour 1 dollar américain.

Il est clair que les effets de l’augmentation du taux de change se font sentir depuis quelques mois tant dans les prix des biens alimentaires que dans les autres biens les plus complexes comme les biens électroniques ou encore les pièces de voitures.

Nous ne voulons alarmer personne, mais il faut comprendre que l’économie vit une situation particulièrement difficile et que la résolution de cette crise socio-économique précaire n’est pas pour demain, car nous faisons faces à des problèmes structurels qui gangrènent avec la conjoncture politique et l’instabilité institutionnelle dans le pays et qui requièrent donc  une longue période de stabilité et un véritable plan de relance de l’économie qui ne doit pas venir du  »blanc » (l’international), mais un plan national,  conçu par des Haïtiens qui définit toutes les politiques publiques stratégiques à mette en œuvre dans tous les secteurs productifs pour l’amélioration des conditions de vie dans le pays.

 

Riphard Serent, MPA (Policy)

Economiste

Radio Vision 2000

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