Haïti – Économie: Les grands défis pour les économies en développement en 2030. Quelles perspectives pour Haïti
De nouvelles tendances mondiales telles que la croissance sans emploi, l’augmentation de la population jeune et l’épuisement des ressources naturelles sont des menaces qui mettent en péril l’essentiel des progrès réalisés lors des dernières décennies afin d’assurer aux individus la possibilité de gagner leur vie. C’est le constat que fait un nouveau rapport du Centre de développement de l’OCDE, présenté aujourd’hui à Paris dans le cadre du Forum Mondial sur le Développement. Assurer des moyens de subsistance pour tous : Prévoir pour mieux agir, ce rapport utilise une approche prospective en vue de développer des scénarios possibles de subsistance pour le monde en 2030. Il montre plus loin que la vulnérabilité et le risque de retomber dans la pauvreté extrême restent élevés dans un contexte mondial changeant.
Il faut dire que dans la plupart des régions en développement, 80 % des individus ont le sentiment de se battre, voire de souffrir, dans leur vie quotidienne, plutôt que de s’épanouir. Ce qui n’est pas différent de la situation qu’on a en Haïti. En outre, des tendances émergentes dans les domaines économique, technologique, démographique, environnemental et de la sécurité pourraient avoir des conséquences négatives sur les moyens de subsistance, dans les décennies à venir.
Parmi les tendances mondiales inquiétantes, il faut parler de l’accroissement des inégalités dû au partage non équitable des fruits de la croissance économique. Il est estimé que les plus pauvres, soit 66 % de la population mondiale, reçoivent moins de 13 % des revenus mondiaux, et environ 70 % des personnes sous-alimentées dans le monde vivent dans des pays à revenus intermédiaires.
La deuxième grande tendance concerne la croissance sans emploi dans les pays émergents et dans ceux en développement. Le cas de la Chine est frappant : entre 1991 et 2012, le PIB a été multiplié environ par neuf (ajusté en fonction de l’inflation), alors que l’emploi total stagnait et que le taux d’activité des 24-65 ans passait de 85 % à 77 %. Dans notre cas, c’est encore plus grave, vu qu’on enregistre même pas une croissance adéquate, soit environ 2,8% l’année dernière, et une prévision de 2,5% pour cette année.
Troisième grande tendance: les fragilités financières persistantes. Ces dernières années, des mesures politiques de grande envergure ont été mises en œuvre afin de diminuer la fragilité des systèmes bancaires et financiers, mais il reste encore du chemin à parcourir pour que le système soit véritablement solide. Il est probable que les prochains grands chocs viennent des marchés émergents, dont les entreprises en plein essor ont profité de prêts massifs octroyés par le système financier mondial. Une dernière tendance est la croissance de la population jeune qui va générer une pression importante notamment dans la recherche d’emplois.
Les enjeux environnementaux sont également de grands défis, notamment l’augmentation attendue des épisodes de grande sécheresse. D’ici 2050, plus de 40 % de la population mondiale sera soumise à un stress hydrique prononcé (Lorsque la demande en eau dépasse la quantité disponible. Une situation qui doit inquiéter nous autres en Haïti, car plusieurs prévisions tablent sur des pénuries d’eau atroces dans les 10 à 15 prochaines années, notamment dans les zones les plus reculées de la capitale et dans certaines zones de province.
Un ensemble de défis à relever, et un ensemble de chantiers d’envergure qui attendent bien sur le gouvernement de 2016. Par exemple, pour relever le défi de l’emploi, le gouvernement pourrait œuvrer en faveur de la formation tout au long de la vie et promouvoir des portefeuilles de moyens, composés de travail à temps partiel, de formations rémunérées et d’allocations chômage, et aussi créer des conditions favorables non seulement pour la venue d’investissement étrangers mais surtout pour la création et le développement d’entreprises haïtiennes, notamment en termes de facilites fiscales et de financement sans oublier un meilleur accès à l’énergie. En 2030, on risque de rester encore un pays pauvre, et c’est presque sur, car le statut de pays émergent n’arrivera pas automatiquement ou par magie comme le prétendait l’ancien chef du gouvernement haïtien. Pour arriver à une Haïti émergente, cela doit être un résultat d’une longue période de croissance soutenue à travers de bonnes politiques publiques stratégiques mettant en valeur les secteurs porteurs de l’économie nationale pour la création nette d’emploi, la stabilité politique et un vrai apaisement social.
Etzer S. Emile, M.B.A
Economiste
Radio Vision 2000