Nouvelle étude sur la perception des pays de leur sécurité. Le cas d’Haïti. Quelle relation avec les Investissements étrangers ?
Selon une étude publiée par Gallup rendue public cette semaine, les populations de l’Amérique latine et les Caraïbes se sentent moins en sécurité dans leurs communautés que les habitants de toutes les autres régions du monde l’an dernier. Donc, en 2013, la région a réalisé une note de 56 (sur une échelle de 0 à 100) pour l’indice law and order (qu’on pourrait textuellement traduire par un indice de droit et sécurité), un indice qui est basé sur la confiance dans la police locale, le sentiment de sécurité personnelle, et l’auto-déclaration des incidents de vol. En effet, les résidents des régions de l’Asie du Sud-Est, Asie de l’Est, les États-Unis et le Canada étaient les plus susceptibles de se sentir en sécurité selon cette étude.
L’étude de Gallup a été basée sur des enquêtes téléphoniques et en présentiel entre 2009 et 2013 et a été conduite auprès de 1000 adultes de plus de 15 ans de chaque pays, avec une marge d’erreur entre 2,1% et 5,6%, et un niveau de confiance de 95%.
Quand nous regardons en profondeur ce classement, nous remarquons que huit pays sur 10 où les taux d’homicides sont les plus élevés se trouvent en Amérique latine et dans les Caraïbes. D’ailleurs un autre rapport des Nations Unies publié en 2012 a reconnu que la région Amérique Latine et Caraïbes enregistre a elle seule 36% des homicides a travers le monde.
Il faut dire que le score le plus faible est enregistré par le Venezuela soit un indice 41 sur 100 qui fait de ce pays le pire non seulement dans la région, mais également dans le monde entier. Cela veut dire, les populations de ce pays se sentent moins en sécurité que les habitants de tous les autres pays du monde notamment pour les homicides.
En 2013, seulement 19% des adultes vénézuéliens ont dit qu’ils se sentaient en sécurité de marcher seul la nuit dans la ville ou la région où ils vivent. En outre, seulement 26% des Vénézuéliens ont exprimé leur confiance dans la police locale et 22% ont déclaré que leur argent ou l’argent d’un autre membre de la famille avait été volé e au cours des 12 derniers mois. En 2012, le Venezuela a connu le taux de assassinat le plus élevé du monde après le Honduras, soit 53,7 homicides sur 100 000 habitants.
Qu’en est –il d’Haïti ?
Pas surprenant. Haïti n’est pas parmi les pires élevés de la région Amérique Latine et Caraïbes en termes de sécurité. Haïti vient en 10eme position parmi les pays ou leur habitants se sentent moins en sécurité. Apres le Venezuela, qui détient la pire des notes, viennent des pays comme Bolivie, Pérou, Paraguay, République Dominicaine, Brésil, Honduras, Argentine et Guatemala qui est en 9eme position. Ici, nous voyons clairement qu’Haïti a une meilleure note que la République Dominicaine en termes de perception de sécurité des habitants que ce soit pour les homicides ou vol. On pourrait se demander, pourquoi ils reçoivent plus d’investissements étrangers alors que le problème de la sécurité chez eux est pire qu’ici ? Carlos Slim, le milliardaire mexicain a la réponse. Quand il était venu en Haïti, il y a de cela quelques années, on lui avait posé cette question, pourquoi vous ne venez pas investir en Haïti, ou encore d’autres investisseurs, est-ce que c’est en raison de l’insécurité? Du banditisme ? Il avait répondu, que la République Dominicaine, ou le Honduras, ou le Mexique ont des taux de criminalité, d’homicide, vol etc… plus qu‘élevés qu’Haïti. Donc le problème n’est pas à ce niveau. Selon lui, nous avons de préférence un problème de justice, de cadre légal, trop d’imprévisibilité et d’instabilité politique, manque d’infrastructures solides, réseaux routiers trop déficients.
Aucune garantie pour quelqu’un qui achète un terrain, aucune garantie pour quelqu’un qui a une affaire devant la justice même s’il avait raison ? L’Etat de droit, la capacité de faire respecter la loi, la capacité de bonne gestion de litiges divers n’existent pas ici. En fait, Haïti a un cadre légal inapproprié, désuet, et très limité. Les lois qui existent ne sont pas nécessairement respectées ou appliquées, l’émotion ou l’improvisation, très souvent la politique ou les pressions populaires prennent le dessus sur le droit.
C’est bien quand même de ne pas être parmi les 3 derniers ou 5 derniers de la classe, mais cela ne suffit pas, qui pis est, il y a des risques de détérioration avec l’évasion de la prison de la croix des bouquets. Donc, pour les investisseurs étrangers, il faut leur donner la garantie juridique avec des institutions fermes, une gouvernance politique qui inspire confiance, un vrai cadre légal et des investissements d’envergure dans l’énergie et les infrastructures de base. En ce sens, il faut dire qu’Haïti n’est pas encore assez attirante pour attirer des investissements substantiels.
Etzer Emile, M.B.A
Economiste
Radio Vision 2000