Haïti : Kristensen, employé de l'ONU, raconte ses cinq jours enterré vivant

Pendant cinq jours, Jens Kristensen a eu le sentiment qu’il vivait dans un cercueil. Sous l’amas de décombres du siège de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), cet employé de l’ONU était coincé dans un espace si étroit et si sombre qu’il ne voyait pas de différence les yeux ouverts ou fermés.

Ce Danois de 48 ans a survécu à cette épreuve, déshydraté et endolori, mais avec seulement un bleu à un bras et une éraflure à sa main droite quand une équipe de sauveteurs des Etats-Unis l’a sauvé le 17 janvier.

Trois jours après avoir été secouru, M. Kristensen était de retour au travail en tant que responsable de la coordination des efforts de secours entre le Département des opérations de maintien de la paix de l’ONU, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et d’autres agences.

« Si vous voyez les destructions en Haïti en ce moment, c’est énorme. Je ne peux pas seulement être évacué. Je me sens physiquement courbatu après cinq jours sur une dalle de béton mais mentalement je me sens suffisamment fort pour travailler. Et surtout à un moment où le pays a tant besoin d’assistance », dit-il dans un entretien au Centre d’actualités de l’ONU.

Les opérations humanitaires occupent tellement M. Kristensen qu’il n’a pas cherché à obtenir un soutien psychologique, qui est mis à la disposition des employés de l’ONU à Port-au-Prince.

« Je pense que je peux gérer cela, même si vous ne savez pas vraiment. On verra dans quelques semaines. Actuellement, je suis affairé. Cela me maintient occupé. Peut-être quand je ne serai pas occupé, il y aura une réaction. C’est ce que tout le monde me dit. C’est peut-être vrai. Je ne sais pas », raconte-t-il.

M. Kristensen a travaillé lors du tremblement de terre en Afghanistan en 2002, lors du séisme en Turquie en 1999 et lors de celui en Equateur en 1987. Mais jamais il ne s’est trouvé dans une situation aussi traumatisante que d’être « enterré vivant pendant cinq jours sans savoir si l’on va vivre ».

A 16h53 le 12 janvier, M. Kristensen était à son bureau au troisième étage de l’hôtel Christopher qui accueillait le quartier général de la MINUSTAH. Il lisait des documents pour une réunion le lendemain. Le séisme a commencé par une petite secousse et ensuite quatre secondes plus tard, le tremblement de terre a frappé.

« Je me suis posé la question en une seconde si je devais me précipiter vers la porte ou me cacher sous la table. La porte s’est refermée et j’ai pensé que c’était peut-être trop loin et que je serais pris sous les débris, aussi je me suis caché sous la table », raconte Jens Kristensen. Des étagères sont tombées sur le bureau, empêchant que le bureau et lui-même soient complètement écrasés.

« J’étais confiné comme dans un petit cercueil. Long d’un mètre cinquante et large de cinquante centimètres. Je pouvais bouger un petit peu sur le côté et courber mon cou », dit-il.

Une fois les secousses terminées, Jens Kristensen s’est servi de la lumière de son téléphone portable pour regarder autour de lui. Il a trouvé un pot de café instantané et une enveloppe. Il a conservé le café dans l’enveloppe et son urine dans le pot. « Cela n’a pas particulièrement bon goût, ni ne sent très bon, mais cela aurait pu prolonger ma survie de quelques jours », raconte-t-il.

Il a tenté de rester calme en évitant de trop bouger et en se concentrant sur ses efforts pour attirer des sauveteurs. Le plus difficile était de garder une idée du temps. « Je ne savais pas si j’avais dormi cinq minutes ou cinq heures. Il est difficile de rester sain d’esprit et calme quand vous ne savez pas le jour et l’heure », dit-il.

Il reconnaît qu’il a envisagé la possibilité qu’on ne le retrouve pas. « Je me suis demandé combien de temps cela prendrait de mourir et que c’était une horrible façon de mourir. Si vous avez un accident, au moins vous mourez rapidement. Là vous avez des jours et des jours pour en finir. Quelle fin horrible ».

Dimanche autour de 6:30 du matin, M. Kristensen a entendu des voix étouffées à quelques mètres de l’endroit où il était enterré vivant.

« Je me suis dit. Non, je suis trop fatigué pour frapper et crier. Je pouvais sentir que c’était plus qu’un effort mais je me suis dit que je devais saisir la moindre chance », dit-il. Six heures plus tard, il a vu les visages de ses sauveteurs. « C’était extraordinaire. Je ne peux expliquer cela. C’est comme si c’était une seconde naissance ».

Source: ONU

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *