Haïti – Économie: La dépréciation de la gourde et la réponse de la BRH
En juin 2007, le taux de change moyen mensuel était de 36 gourdes 28 gourdes pour un dollar. Aujourd’hui le taux affiché a atteint 56 gourdes pour un dollar alors que le taux réellement pratiqué peut atteindre facilement les 58 gourdes selon le montant. Donc en 8 ans, le dollar a enregistré une hausse de près de 60% par rapport a la gourde. En clair, les épargnes en gourde, les salaires en gourdes des ménages haïtiens ne valent plus ce qu’ils représentaient avant.
Ce taux de 56 gourdes était déjà atteint vers juin de cette année, et la BRH sous pression politique et sociale était venue avec des mesures pour contrecarrer la montée du dollar. Augmentation du taux de réserve obligatoire, augmentation du taux sur les bons BRH, l’injection de millions dans l’économie, un ensemble d’outils qui ont permis a baisser la chaleur sur le marche des changes.
Je l’avais déjà dit dans cette chronique, que ces mesures n’allaient pas faire long feu. J’avais toujours des réserves, cette baisse du taux de change, à quel prix, pour combien de temps ? 4 mois après, la réalité aujourd’hui me donne raison. Le dollar revient au même niveau dans un contexte de marasme économique, ou les entreprises enregistrent chaque jour des chiffres d’affaires plus bas.
Ce n’est pas surprenant de voir les chiffres d’inflation autour de 12% en glissement annuel. La vie chère atteint un pic, les pauvres sont devenus de plus en plus nombreux, on parle de 6 millions, alors que l’insécurité alimentaire n’est pas trop loin du taux de 40% sur le territoire national.
Bref, cette semaine la BRH revient avec la même formule classique, injection des dollars, on annonce 50 millions de dollars américains, pour assécher un peu la surliquidité de la gourde, disent-ils et ainsi renverser la tendance. On veut donc continuer à apporter des solutions superficielles et conjoncturelles alors que les vrais indicateurs ou les vraies causes de ce déséquilibre ne sont pas attaqués. L’explication de cette situation de surchauffe doit être trouvée dans le secteur réel de l’économie. En d’autres termes, l’économie continue de se couper les bras et les pieds pendant qu’elle veut que l’infirmière la soigne avec des pansements. La BRH ne pourra pas résoudre le problème car le problème n’est ni monétaire ni conjoncturel, on fait face a des déséquilibres structurels. Le pays doit produire plus, exporter plus, attirer davantage d’IDE, avoir des finances publiques plus saines.
Sinon, on aura à injecter des dollars demain et après demain, mais le problème restera entier, et les déséquilibres seront plus grands. Dommage, le gouvernement est occupé à gérer la crise électorale, et elle n’aura pas le temps et la tête pour penser a tout cela.
Etzer S. Emile
Economiste
Radio Vision 2000