Haïti – Économie: Quelle strategie pour rembourser la dette du Petrocaribe ? 

Les récentes préoccupations politiques et électorales ont tendance à nous faire oublier certaines questions économiques très importantes comme notamment les questions liées au programme Petrocaribe. Haïti reçoit environ 14 000 barils de pétrole en moyenne par jour en provenance du Venezuela dans le cadre de cet accord signé en 2006.

 

La dette à long terme cumulée au 31 janvier 2015, devant être payée sur une période de 25 ans, se chiffrerait à 1 milliards 999 millions de dollars, donc sensiblement égal à 2 milliards de dollars. Cependant, suite au séisme dévastateur du 12 janvier 2010, la République Bolivarienne du Vénézuela a annulé officiellement 395 millions de dollars de la dette de la République d’Haïti. Par conséquent, la dette effective d’Haïti au 31 janvier 2015 est de 1,6 milliards de dollars. Donc aujourd’hui on est le 7 juillet, c’est presque certain que ce montant est devenu plus grand.  

 

En ce qui a trait aux méthodes de remboursement, on se rappelle qu’en octobre 2013, le ministre haïtien de l’agriculture d’alors, Thomas Jacques, de retour d’une visite officielle de 24 heures au Venezuela, en compagnie de l’ancien Premier ministre Laurent Lamothe et d’autres officiels haïtiens avait annoncé qu’Haïti sera en mesure des le mois de novembre de cette même année d’exporter des produits agricoles et agro-industriels vers le Venezuela en paiement d’une partie de la dette contractée pour l’achat de produits pétroliers dans le cadre de l’accord PetroCaribe.


Le café, le sirop de canne à sucre, la banane et l’haricot noir, même l’igname seraient sur la liste des denrées agricoles qui devraient être exportées vers le Venezuela, auxquelles il faudrait désormais ajouter des produits agricoles à valeur ajoutée comme la farine, les produits laitiers et les pates alimentaires. Où est ce qu’on en est avec cette affaire? S’agissait-il de chanson pour faire dormir les enfants ou peut être nos dirigeants n’avaient pas réfléchi sur l’ampleur et la faisabilité de cette formule de remboursement qui n’était pratiquement pas réaliste par rapport aux faibles politiques au niveau de l’agriculture.

 

Entre temps, la Jamaïque a déjà levé suffisamment de fonds sur le marché financier international pour rembourser ses dettes. D’un autre coté, La République Dominicaine de son coté a déjà payé presque la totalité de sa dette. Aujourd’hui c’est le tour de l’Uruguay qui vient de signer un accord et a présenté un agenda clair pour acquitter sa dette qui est combinée d’une promesse d’annulation d’une partie de la dette de la part du Venezuela qui est présentement en grande difficulté financière et économique.

 

En effet, l’Uruguay devrait rembourser une dette de 400 millions de dollars pour les importations de pétrole, a annoncé lundi le président uruguayen Tabaré Vazquez. Mais l’accord signé hier entre ces deux pays devrait conduire à l’annulation de 34,5% du montant total de la dette pour une montant qui sera désormais moins de 300 millions de dollars, plus précisément 262 millions. Près de 7 fois moins élevé que la dette d’Haïti.

 

Une dette qui sera remboursée en grande partie par les exportations de produits alimentaires. En effet, le Venezuela a entrepris d’acquérir 265 000 tonnes de produits d’aliments de l’Uruguay dont le lait en poudre, le fromage, le soja et le riz.

 

Quid maintenant du programme de remboursement d’Haïti ? Peut on envisager une telle approche quant on considère que, l’agriculture haïtienne n’est ni régulière ni suffisante pour même nourrir la population haïtienne, dont 4 millions sont en situation d’insécurité alimentaire. Donc on en doute de la capacité de cette économie à produire suffisamment et exporter vers le Venezuela pour faire l’équivalence de plusieurs millions de dollars de dette. Si cette approche denrées agricoles contre pétrole n’est pas appropriée ou n’est pas faisable, quelle serait la stratégie alternative ? Personne ne sait. Entre temps on continue à recevoir tranquillement les barils, à faire augmenter les dettes, qui constituent déjà un fardeau financier pour nous et le sera encore pour les générations à venir. Qui pis est, les fonds de Petrocaribe ne sont pas nécessairement investis de manière productive, mis a part les quelques projets d’infrastructures, ils sont souvent utilisés pour des dépenses courantes sans impact sur la production et la capacité de créer de la richesse, voire même pour enrichir des proches du pouvoir. L’actuel ministre Fresner Dorcin peut en témoigner. N’en déplaise à l’ambassadeur vénézuélien en Haïti qui pense que tout va bien dans le meilleur des mondes possibles.

                                                                                                                                  

Etzer S. EMILE, M.B.A

Economiste

Radio Vision 2000

etzeremile@gmail.com

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