Haïti – Séisme: Constructions précaires et pauvreté menacent toujours Haïti face au risque sismique

Adélia Jean pose avec ses enfants devant l’une des maisons qu’elle occupe au village Lumane Casimir.

Source Amélie Baron | RFI

Cinq ans après le séisme qui a frappé Haïti, le 12 janvier 2010, de nombreux habitants continuent d’occuper des logements extrêmement précaires. Le chômage endémique et l’instabilité politique contreviennent directement au développement d’Haïti.

Au moment du séisme, Jean Fils Félizor habitait au coeur de Port-au-Prince. Sa maison n’a pas résisté aux violentes secousses, il se retrouve piégé, son pied droit broyé sous l’amoncellement de béton et de fer. Pour le reste de sa vie, marcher lui demandera un effort particulier. Mais il s’estime chanceux : ses quatre enfants sont en vie et surtout il vit à nouveau dans une maison. « Ça n’est pas très grand, mais c’est sûr. J’ai vécu des mois dans un camp. Ici, je n’ai plus peur ». La famille de Jean fait partie des 475 ménages qui habitent désormais dans le village Lumane Casimir.

Depuis la route nationale qui longe l’alignement de maisons colorées, l’endroit semble désert. Sur ce site à 25 kilomètres du centre de Port-au-Prince, l’Etat a entrepris, en 2011, la construction de 3000 logements. Beaucoup sont encore inachevés ; la compagnie dominicaine tardent à fournir à l’Unité de construction des logements et bâtiments publics (UCLBP, en charge de la gestion du village) des constructions sans vice de forme. Mais l’école publique y a ouvert en octobre 2013 et la vie s’organise. « J’aime vivre ici, je me sens à l’aise, témoigne Lucien Louisnel qui a emménagé en mars dernier. Mais le gros souci est que je n’ai pas de travail et je vais avoir du mal à continuer à payer le loyer de 2500 gourdes. (45 euros) »

Huit jours sous les décombres, sept mois à l’hôpital et toujours sans logement

Eloignés de tout centre d’activités économiques, les habitants du village n’ont pas tous les moyens de payer le transport pour acheter nourriture et eau potable. Et au fil des allées goudronnées, la misère est palpable. Mitile Herlande survit grâce à la charité. « La maison où j’habitais le 12 janvier 2010 s’est effondrée sur moi. J’ai passé huit jours sous les décombres et j’ai été hospitalisée sept mois. A la sortie, une amie m’a accueillie sous sa tente mais elle ne pouvait plus m’aider, moi et mes deux enfants. Alors je suis venue ici et je dors chaque soir là où on veut de moi ». A 31 ans, cette rescapée du séisme, clouée sur son fauteuil roulant, ne reçoit aucune aide publique. Ce qui désole Adélia Jean, sa voisine, qui, elle, ne cache pas qu’elle vit gratuitement dans deux maisons, suite à une rencontre avec l’ancien Premier ministre Laurent Lamothe. L’assistance sociale peut, de fait, s’obtenir sur piston.

Choléra et évictions forcées

En 35 secondes, le séisme a jeté un million et demi d’Haïtiens dans les rues. Beaucoup ont reçu une aide pour payer le premier loyer annuel de leur nouveau logement. Certains habitent toujours dans des abris temporaires, censés durer trois ans. Et près de 80 000 sinistrés vivent encore dans des camps de fortune, dans des conditions inhumaines dénoncées par Amnesty International. Dans son dernier rapport, l’organisation indique qu’un tiers seulement des habitants de ces camps n’ont pas accès à des latrines, une situation dangereuse alors que l’épidémie de choléra sévit toujours dans le pays.

Squattant des terrains privés depuis cinq ans, ces sinistrés vivent surtout sous la menace permanente d’expulsions forcées. « Dans certains cas, la police a utilisé des grenades lacrymogènes et a tiré en l’air à balles réelles lors des expulsions », détaille le rapport d’Amnesty International. « Dans d’autres cas, des groupes armés de machettes et de bâtons ont fait irruption dans les camps pour les démanteler.» La solidarité qui avait uni l’élite riche et la masse défavorisée durant les jours suivant le séisme n’a pas duré. L’impunité a repris le dessus : jamais personne n’a été arrêté pour avoir expulsé une famille d’un camp de fortune.

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