Les pratiques fiscales: Une menace pour nos entreprises

Ca fait déjà quelques semaines, plus spécifiquement la semaine dernière, on écoute dans les nouvelles ici en Haïti que des entrepreneurs se plaignent du fait qu’ils estiment qu’ils sont surtaxés, que ce soit au niveau de la DGI ou de la Douane alors que les services de base ne sont pas fournis par l’État en retour. Comme conséquence, des entreprises commencent à fermer leurs portes, particulièrement aux Cayes et exposent des centaines voire des milliers de gens au chômage, dans un pays ou l’emploi reste à la fois précaire et rare. Voilà en fait, ce qui justifie le choix du thème d’aujourd’hui.

On se rappelle en début d’année, le gouvernement américain a proposé plusieurs lois qui ont été ratifiées par les deux chambres pour offrir des allègements fiscaux aux petites et moyennes entreprises. Pour répéter les mots du président Obama, les entrepreneurs et les petites entreprises sont le moteur de la croissance économique, leurs investissements et l’innovation ont été à la pointe de la reprise économique. C’est pourquoi l’administration américaine mise sur le renforcement des petites entreprises en signant des lois pour la réduction d’une dizaine de taxes en faveur de ces entreprises. Le passage de ces projets de loi devra permettre à ces entreprises de faire une économie d’impôt jusqu’à 2.500 dollars par année, par rapport au montant qu’elles devraient payer initialement.

D’autre part, plus près de nous, la Jamaïque s’est aussi engagé à rendre son système fiscal plus adapté. Ainsi, la semaine dernière ce pays a signé un prêt de 80 millions de dollars avec la Banque interaméricaine de développement (BID) pour améliorer «l’efficacité et l’efficience » de son système fiscal.

Ce financement lit-on dans un journal jamaïcain qui vise  » la viabilité budgétaire,  » a pour objectif la réduction des distorsions fiscales, le recouvrement des recettes et l’amélioration du contrôle du gouvernement sur les dépenses budgétaires, entre autres mesures.

Enfin de compte, ces réformes fiscales au niveau de la Jamaïque vont réduire la ponction fiscale, donc une bonne partie des entreprises et citoyens paieront une partie moins importante de leur revenu aux autorités fiscales.

Mais à quoi peut-on s’attendre d’une réduction d’impôt pour des entreprises et des citoyens?

Dans notre chronique du 29 janvier, on a présenté deux cas:

D’abord, la Nouvelle Zélande, ou le ministre néo-zélandais Maurice McTigue a rapporté que la Nouvelle Zélande avait réduit de moitié le taux de l’impôt sur le revenu et supprimé un certain nombre de taxes annexes dans les années 1980. Paradoxalement, les recettes de l’État ont augmenté de 20 %.

Au Royaume-Uni également, la tranche marginale de l’impôt sur le revenu passa sous Margaret Thatcher de 83 % à 40 %, soit a peu près la moitié, et cela a entrainé immédiatement une hausse des recettes fiscales de 1,2 milliard de livre sterling pour l’exercice fiscale 1985-1986.

Maintenant, en Haïti on n’est pas contre la DGI qui fait son travail, mais elle doit de préférence s’assurer que tout le monde paie, et ne pas augmenter de manière irrégulière la portion payée par le minimum de contribuables qui paient.

D’une part, cela encourage des gens à pratiquer l’évasion fiscale, et incite d’autres à juste fermer les portes de leurs entreprises, comme c’est déjà le cas pour plusieurs entrepreneurs, que ce soit dans la capitale aussi bien que dans certaines villes de Province. Donc, en dernière instance, la DGI tuera elle même la taxe en voulant surtaxer ceux qui veulent payer.

Un contexte extrêmement difficile et décourageant pour les PME, alors que les grandes chaines d’hôtels ou autre investissements directs étrangers qui sont venus dans le pays sont exonérés de certaines taxes notamment les impôts sur les dividendes, et jouissent des facilites douanières. Ce sont de bonnes choses pour les IDE, mais quelle politique pour supporter les entreprises haïtiennes? Donc, on a l’impression que le pays veut faciliter les grandes entreprises étrangères et compte asphyxier les entreprises locales notamment les petites et moyennes.

Oui il faut diminuer l’informel dans l’économie, mais l’Etat doit se montrer plus transparent, et plus efficace de manière à se sentir de plus en en plus confortable pour poursuivre ceux qui refusent de payer les taxes. Notre taux de pression fiscale est bien faible par rapport a la zone, autour de 10, 11 % contre un taux entre 18 et 23 % dans la zone, mais il faut des mesures d’accompagnement, et s’assurer que les citoyens et entreprises bénéficient des services sociaux si on veut l’augmenter.

Le pays doit être définitivement open for business pour entrepreneurs haïtiens d’Haïti avec de meilleures facilités fiscales, de procédures, de financement et autres surtout quand ils viennent de démarrer une activité économique. Cela aidera mieux en termes de croissance économique que cette volonté de ramasser les taxes aveuglement et de manière discrétionnaire.

Chiffre pour aujourd’hui : 12 milliards

Près 12 milliards de dollars américains ont été collectés par le gouvernement dominicain contre un peu plus que 700 millions pour Haïti, soit presque 20 fois plus pour la RD. Certes ils ont un taux de pression fiscale plus élevé, mais, cela dépend majoritairement de l’environnement des affaires qui facilitent davantage la création de richesse. Des chiffres qui doivent nous porter à réfléchir un peu plus.

Etzer Emile, Radio Vision 2000

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