Haïti – Économiique: Près de 200 000 familles haïtiennes affectées par la sécheresse: une véritable catastrophe
Selon la Coordination Nationale de la Sécurité Alimentaire (CNSA), l’insécurité alimentaire va se détériorer jusqu’à la fin de 2015, avec une accélération attendue de la pauvreté, du nombre de cas de malnutrition sévère aiguë et de maladies d’origine hydrique.
Une évaluation rapide de la situation agricole en mai dernier, réalisée par la CNSA et quelques-uns de ses partenaires du Groupe Technique Sécurité Alimentaire et Nutrition (GTSAN), a montré que la sécheresse a eu un effet négatif sur la disponibilité de l’eau et des produits locaux sur les marchés. Cette situation a abouti à une sécheresse qui affecte particulièrement les régions de Sud-Est, du Nord-Ouest, du Haut Artibonite…. du Centre et du Nord-Est.
Selon le rapport d’évaluation de la CNSA, 199,967 familles qui dépendent principalement de l’agriculture, sont affectées par cette situation au niveau des 10 Départements du pays. L’évaluation a permis d’observer un arrêt prématuré de la saison de pluie, une absence totale de pluie dans certaines zones et un début tardif dans d’autres zones. La pluviométrie s’est révélée nettement insuffisante et irrégulière au niveau de la majeure partie du territoire. On risque donc de perdre près de 60% de la production agricole pour l’année dans différents départements.
Pour ce qui est de l’accès à l’eau, il a été constaté un tarissement ou une baisse du débit des sources. En conséquence, on assiste à une forte pression sur les rares points d’eau où l’on enregistre beaucoup de violences, surtout au Sud-Est et au Nord-Ouest. La question de l’eau devient de plus en plus critique particulièrement à Grand-Gosier, Thiotte, Anse-à-Pitres (Bois-d’Orme), Belle-Anse (Baie d’Orange, Marbriole).
A Thiotte, par exemple, deux points d’eau existent au niveau de la commune dont un difficilement accessible pour la majorité de la population. Des familles mettent 3 à 4 heures, rien que pour se rendre à ce point d’eau. A Grand Gosier, les familles doivent se rendre à Thiotte ou à Belle Anse pour s’approvisionner en eau à moins de s’approvisionner dans le puits d’eau saumâtres du bord de mer.
Dans d’autres régions, les familles achètent environ 5 gallons d’eau qu’on appelle couramment « bokit » des fois a 25 gourdes jusqu’à 50 Gourdes. En plus, de l’eau qui n’est pas nécessairement potable.
D’un autre coté, la rareté des semences (en raison des pertes de récoltes) pour la prochaine campagne, risque d’affecter la prochaine saison agricole (semis en juillet/août), une production agricole qui a déjà connu une baisse significative au début de cette année fiscale.
Dans un contexte comme celui-ci, un renforcement des programmes d’alimentation des ménages est à prendre en compte, ainsi que la mise en œuvre d’activités de haute intensité de main-d’œuvre. À moyen terme, les actions doivent être orientées vers la maitrise de l’eau notamment la construction/réhabilitation de système d’irrigation et la construction de retenue collinaire et de citernes familiales.
En ce qui a trait aux réponses urgentes, la CNSA recommande que « les actions de distribution d’eau (déjà initiée par la DINEPA au niveau du Sud-Est) soient appuyées et renforcées. La distribution des kits de traitement de l’eau et la distribution des kits alimentaires en support aux programmes de cantines scolaires pour la prochaine rentrée scolaire doivent être renforcées. Il est également urgent de permettre aux agriculteurs de reprendre leur activité de production agricole en leur fournissant des semences et des intrants agricoles. Des actions de formation des communautés rurales affectées sur les pratiques agricoles résilientes à la sécheresse et l’éducation nutritionnelle, sont aussi nécessaires ».
Voilà une situation de sécheresse qui devient plus criante, et qui risque de s’aggraver pendant ces mois à venir notamment avec la période des cyclones et aussi avec la déportation de nos centaines milliers d’haïtiens ou dominicains d’origine haïtienne. Le niveau d’insécurité alimentaire risque donc d’augmenter encore pour toucher la barre des 4 millions de personnes. Une vraie crise humanitaire, conséquence de choix économiques, choix politique et de choix électoraux imprudents également dans ce pays qui n’arrive toujours pas à décoller. Les problèmes sont vraiment complexes et on n’a pas toujours l’impression qu’ils sont vus comme tels.