ET PENDANT CE TEMPS, HAÏTI S’ENTERRE

Le 12 janvier 2010, alors que le pays compte déjà parmi les plus pauvres de la planète, un séisme de magnitude 7 sur l’échelle de Richter a dévasté Haïti. Le bilan est dramatique : plus de 230 000 morts, 300 000 blessés, 1,5 million de sans-abris réfugiés dans des camps d’urgence et des dégâts matériels innombrables. Avec la sécheresse et les passages de l’ouragan Isaac puis du cyclone Sandy en 2012, la situation s’aggrave davantage.


Crédit Photo -- RICK LOOMIS / LOS ANGELES TIMES

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Elle a sucité l’émotion à l’échelle internationale. C’est pourquoi l’île d’Haïti a reçu une aide militaire et humanitaire considérable. Mais le processus de reconstruction est désormais en panne.

UNE SITUATION HUMANITAIRE CATASTROPHIQUE

80 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. Les camps de réfugiés s’étendent et se transforment de plus en plus en bidonvilles. Près de 350 000 personnes, dont un quart est menacé d’expulsion, vivent dans 496 quartiers de fortune. L’exemple le plus terrible est celui du camp Corail, le plus grand bidonville de Port-au-Prince, qui est passé de 7 000 à 200 000 habitants depuis le séisme.

Dans ce contexte, le bilan sanitaire est déplorable. Outre la montée de la violence et la taux élevé de mortalité infantile, le choléra sévit fortement depuis deux ans. Déclaré en octobre 2010, il a touché plus de 650 000 personnes et en a tué 8 100. Durant le dernier printemps, le traitement de la maladie s’est encore dégradé. Selon Médecins Sans Frontières, cela s’explique par l’arrivée de la saison des pluies, mais surtout par le manque de moyens matériels et financiers attribués pour les soins.

LE CHOLÉRA IMPUTÉ À L’ONU

Les Haïtiens attribuent l’origine de l’épidémie aux Casques bleus népalais. Ces rumeurs ont été confirmées par quelques analyses scientifiques, à l’instar de celle publiée en juin 2011 par les centres américains de contrôle et de prévention des maladies. La même année, un groupe d’experts indépendant mandaté par l’ONU a, quant à lui, conclu que la maladie venait de la confluence de plusieurs circonstances et n’était pas dûe à l’action délibérée d’un groupe ou d’un individu.

En février dernier, l’ONU a fait valoir son immunité pour refuser l’indemnisation demandée par quelque 5 000 victimes du choléra. Le 8 mai, les victimes de l’épidémie ont donné soixante jours aux Nations Unies pour obtenir un accord, sous peine de porter plainte. L’Institut pour la justice et la démocratie en Haïti (IJDH), qui dit représenter désormais plus de 8 000 victimes, affirme qu’en cas de procès, il demandera 100 000 dollars pour chaque mort, et 50 000 dollars pour chaque personne infectée.

Les Nations Unies maintiennent néanmoins leur volonté d’agir pour l’éradication du choléra. En décembre, l’organisation a lancé un appel de fonds de 2,2 milliards de dollars afin de financer une campagne sur dix ans, centrée sur l’amélioration des conditions sanitaires, la fourniture d’eau potable ainsi qu’une nouvelle méthode orale de vaccination.

DES BESOINS FINANCIERS CONSIDÉRABLES

Comme l’illustre l’initiative onusienne, l’amélioration de la situation en Haïti nécessite des moyens financiers énormes. Le 11 mars, le Fonds monétaire international (FMI) a annoncé avoir mis 7,4 millions de dollars supplémentaires à la disposition d’Haïti. Cette somme porte à environ 54,1 millions de dollars le montant total des prêts débloqués par l’institution en faveur de l’île depuis juillet 2010.

Le 21 mai, la Banque Mondiale a fait savoir qu’elle accordait deux nouveaux dons, d’un total de 90 millions de dollars, à Haïti. Le premier, d’un montant de 70 millions de dollars, vise à accroitre l’accès aux services de santé maternelle et infantile de base. L’économie toute entière devrait en tirer profit. Le second don s’élève à 20 millions de dollars. Il doit améliorer le climat des affaires du pays afin d’attirer les investissements privés et de générer la croissance.

UN APRÈS-CATASTROPHE DÉLICAT

Malgré ces aides ponctuelles et bien que depuis trois ans, les choses aient progressé, le manque de solutions durables se fait sentir. La transition entre secours d’urgence et développement de la crise à long terme est difficile. Aujourd’hui, le principal problème est que l’aide faiblit. Une partie des organisations non-gouvernementales humanitaires quitte le terrain sans qu’Haïti soit en mesure de prendre le relai.

Dans cette « république des ONG », les moyens ont jusqu’à présent été dépensés sans plan global de reconstruction, notamment parce que les acteurs internationaux agissent sans la participation des autorités haïtiennes. Le président de la République, Michel Martelly, déplore la mise à l’écart du gouvernement dans la gestion de l’aide obtenue après la catastrophe. « Les politiques menées jusqu’à présent par les autorités haïtiennes et par les organisations internationales qui sont intervenues massivement en Haïti ont largement échoué », estime la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH).

L’ADMINISTRATION MARTELLY / LAMOTHE ACCUSÉE DE CORRUPTION ET DE DÉTOURNEMENT DE FONDS

Autre problème : l’utilisation des fonds d’urgence. Le Premier Ministre, Laurent Lamothe, ainsi que des membres de son gouvernement ont été convoqués par sept sénateurs de l’opposition. Ceux-ci réclamaient des explications sur l’utilisation des cinq milliards de gourdes obtenus dans le cadre de l’état d’urgence déclaré après le passage de Sandy. L’administration Martelly /Lamothe est accusée de corruption et de détournement de fonds. Convoqué pour la troisième fois le 28 mai, le Premier Ministre, en visite au Brésil, a à nouveau demandé un report de l’audience. Les sénateurs, exaspérés, menacent de recourir à l’interpellation du chef du gouvernement.

Outre la gestion des fonds d’urgence, les parlementaires de l’opposition dénoncent des lire la suite sur www.lejournalinternational.fr

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