Haïti-Environnement : Alerte sur les impacts négatifs de l’exploitation aurifère

Un modèle d’exploitation aurifère, pouvant avoir un impact négatif sur les ressources naturelles du pays, dont l’eau, se pointe à l’horizon en Haïti, prévient l’écrivain et professeur québécois de la « pensée critique » au département de sciences politiques de l’Université de Montréal, Alain Deneault, lors d’une conférence tenue, le 7 mai 2013, à la Fondation connaissance et liberté (Fokal).

Titulaire d’un doctorat en philosophie, Deneault signale des signes avant-coureurs néfastes de ce modèle (notamment l’utilisation des centaines de litres d’eau à la seconde), qui a déjà sévi partout.

Cette situation d’exploitation « défie l’entendement et choque l’intelligence », critique-t-il.

Il appelle la population haïtienne à s’interposer contre les exploitations de l’or qui risquent d’avoir de lourdes conséquences sur le pays.

« Je crois qu’on ne devrait jamais extraire de l’or, surtout en Haïti », déconseille-t-il, indiquant que « les sociétés minières sont hors de tout contrôle et échappent à leurs responsabilités ».

Un désastre annoncé

En exploitant de l’or, on risque de polluer des paysages, au point de les détruire, à cause de l’utilisation du cyanure, produit chimique hautement toxique, avance-t-il.

« Ce produit polluant peut tuer des bétails, des oiseaux, et rendre l’agriculture impossible ».

« Les biens, qu’on extrait du sol, sont épuisables », fait-il remarquer, soulignant combien ces exploitations ne visent pas un développement économique à long terme.

D’un point de vue sociologique, la réalisation de ces types de projets dans un pays, par exempleHaïti, entraîne des déplacements migratoires de ses habitants en quête d’emplois illusoires, observe-t-il.

Mais, les emplois ne profitent qu’aux occidentaux, constate-t-il.

« On engage des ingénieurs miniers, foreurs, des comptables et des gestionnaires, qui ont été formés en Occident et qui sont des expatriés qui vont vivre aux crochets de la population [d’accueil] sans, pour autant, apporter du développement », dénonce-t-il.

Les petits emplois, les petits boulots, sont réservés aux membres de la communauté locale à très court terme, fait savoir Deneault.

Pour sa part, le directeur exécutif de la plateforme de plaidoyer pour un développement alternatif (Papda), Camille Charlmers, appelle à une éducation des communautés (menacées dans le pays) pour défendre leurs intérêts stratégiques et ceux de la société, par rapport aux effets nocifs que peut engendrer l’exploitation de l’or par les sociétés minières qui se soucient uniquement de leurs intérêts et profits.

Une machine inquiétante déjà à l’œuvre

Près de 3,885 kilomètres carrés de territoire haïtien, soit 15 pour cent de tout le pays, sont déjà sous une licence de recherche, d’exploration ou d’exploitation, ou sont soumises à une convention contrôlée par des firmes américaines et canadiennes, révèle une enquête réalisée par Ayiti Kale Je (AKJ), partenariat médiatique dont fait partie l’agence en ligne AlterPresse.

Ces exploitations permettraient des bénéfices estimés à quelques 20 milliards de dollars américains (US $ 1.00 = 44.00 gourdes ; 1 euro = 60.00 gourdes aujourd’hui).

Deux ministres haïtiens avaient signé, avec Newmont et Eurasian, un « protocole d’entente » qui avait autorisé illégalement les compagnies à commencer le forage dans un des sites en exploration.

L’Eurasian Minerals a prélevé 44,000 échantillons, tandis que la Newmont Mining, deuxième productrice d’or au monde, qui a largement investi auprès d’Eurasian, envisageait la possibilité d’exploiter au moins cinq sites miniers.

La Newmont Mining exploite la plus grande mine en Amérique.

Charlmers rappelle les conditions controversées, dans lesquelles les licences ont été accordées, en décembre 2012, à ces sociétés minières étrangères, notamment la Newmont Mining, en vue de l’exploitation de l’or dans le pays, en dehors des prescrits de la loi de 1976.

Cette loi comporte un ensemble d’exigences, visant la protection des gisements miniers dans le pays.

Le cadre juridique, consacré par cette loi, définit quatre types de contrats qui n’ont pas été réellement respectés : des contrats d’exploration, de recherche, d’exploitation et de concession.

L’économiste tient à applaudir la résolution du sénat, appelant récemment à la cessation des contrats controversés et un arrêt des exploitations minières dans le pays, en vue de permettre une réévaluation de la situation et une discussion approfondie sur la question.

Cette résolution a été votée, le 20 février 2013, par le sénat de la république.

Cette résolution sénatoriale a été une étape essentielle, « mais rien n’a changé dans les communautés », déplore le représentant de la Padpa. (alterpresse.org)

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