Haïti-Duvalier : Maintenir le devoir de mémoire autour du massacre du 26 avril

Le Comité de commémoration du 26 avril appelle la population haïtienne à l’accompagner dans l’accomplissement du « devoir patriotique qu’est le devoir de mémoire » lié au massacre du 26 avril 1963, orchestré par le dictateur François Duvalier, père de Jean Claude.

Le 26 avril 1963 rappelle le massacre de plusieurs familles notamment de militaires, soupçonnés d’implication dans une tentative d’enlèvement de Jean-Claude Duvalier.

Lors de cette opération sanglante, des maisons avaient été incendiées avec leurs occupants, des enfants enlevés, des familles entières arrêtées, torturées, tuées, disparues.

« C’est avec une très grande émotion et aussi une profonde humilité que je m’adresse à vous pour honorer la mémoire de nos chers disparus : nos pères, nos mères, nos enfants, nos fils, nos filles, nos frères, nos sœurs et nos amis », exprime l’une des membres de ce comité, Marguerite Bouchereau Clérié, lors d’une conférence de presse à laquelle a pris part AlterPresse, le mercredi 24 avril 2013.

Elle précise que ce devoir de mémoire n’a rien à voir avec la revanche encore moins la vengeance. C’est une pratique de recherche historique pour la connaissance des faits dans leur moindre détail autour du massacre du 26 avril, explique t-elle.

Elle souligne que la pratique du devoir de mémoire vise à « comprendre ce qui s’est passé pour que cela ne se reproduise plus jamais, en d’autres mots comprendre ce qui s’est passé pour empêcher le retour des conditions politiques et sociales qui ont permis l’instauration de ces régimes autoritaires ».

« Il faut nommer les bourreaux et les juger si possible pour qu’ils sachent que la société leur reproche leurs crimes. Il faut aussi célébrer les anges gardiens, ces hommes et ces femmes qui au mépris de leur propres vies sont venus en aide à des victimes ou se sont interposés entre bourreaux et victimes ».

Pour Clérié, dont le père a disparu lors des évènements du 26 avril 1963, le devoir de mémoire est aussi une pratique de support aux survivants, une reconnaissance importante de leurs souffrances passées et présentes.

Quels mécanismes sociaux conduisent des êtres humains à sombrer dans la cruauté dans la barbarie, s’interroge t-elle, avec une pointe d’émotion.

« Il faut éduquer et éduquer en permanence. C’est une manière de forcer une société à voir et à reconnaitre ses pires horreurs. C’est une manière de maintenir présent à l’esprit de tous, les actes de cruauté dont se sont rendus coupables les dictateurs de tous bords et leurs multiples collaborateurs », encourage t-elle.

Pour sa part, la coordonnatrice du Collectif contre l’impunité, Danièle Magloire, rappelle le combat difficile mené en Haïti depuis le retour du dictateur Jean Claude Duvalier (janvier 2011) en vue de faire échec à l’impunité, refuser la banalisation de la dictature et la négation des crimes contre l’humanité perpétrée par les Duvalier.

Elle mentionne les témoignages des plaignants et plaignantes du Collectif depuis février 2013 devant la cour d’appel sur les violations subies et les innombrables exécutions et disparitions des citoyens et citoyennes durant le régime duvaliériste.

Dans cette affaire, le dictateur Jean Claude Duvalier est poursuivi pour crimes contre l’humanité et détournements de fonds.

Elle condamne le comportement des défenseurs, supporteurs et héritiers de Duvalier qui jettent le blâme sur les victimes et insultent la mémoire des milliers de personnes broyées par la machine duvaliériste.

« Si le peuple haïtien n’avait pas fait le 7 février 1986, nous aurions eu droit à un deuxième héritier assumant, comme le premier, le prix du sang, la politique d’anéantissement du pays », avance Magloire pour critiquer le petit-fils de François, fils du dictateur Jean Claude, en l’occurrence François Nicolas Duvalier.

Ce dernier a tenté, sans vergogne, de réhabiliter son grand-père à travers un texte publié dans le Nouvelliste à la veille de la commémoration de la date symbolique du 26 avril.

Soulignant la valeur symbolique de cet événement dans l’histoire d’Haïti, le Collectif appelle à refuser l’oubli, honorer la mémoire des victimes et la résistance et, surtout, exhorte à la « vigilance citoyenne ». (alterpresse.org)

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