Les habitants de Fort Jacques debout face à la terreur des gangs armés
Sous la menace de gangs lourdement armés, depuis plusieurs semaines, les habitantes et habitants de Fort Jacques, dans la commune de Kenscoff (à l’est de Port-au-Prince), appellent les autorités policières à se joindre à eux, pour combattre les bandits armés, qui continuent de semer la terreur, dans la zone, selon les informations rassemblées par l’agence en ligne AlterPresse.
A travers une brigade de vigilance Fòs Rezistans Loten, regroupant des associations de base de la commune de Kenscoff, ils promettent de se défendre jusqu’au bout contre les bandits, qui tenteraient de les attaquer.
Une manifestation, rassemblant des dizaines de riveraines et riverains, a eu lieu, le mercredi 24 mai 2023, à Fort Jacques pour dénoncer les actes de banditisme.
Les protestataires, vêtus pour la plupart de t-shirts blancs, arborant les couleurs du drapeau national bleu et rouge, armés de machettes et de branches d’arbres, ont crié leur désarroi.
Ils se sont engagés à défendre leur zone à travers le mouvement de résistance populaire, dénommé Bwa Kale, face aux gangs qui menacent et envahissent leurs lieux de résidence, en commettant des forfaits souvent meurtriers.
« C’est pour la première fois que la zone vit une telle situation. Ici nous somme des citoyennes et citoyens paisibles, qui vivaient en parfaite harmonie et dans la solidarité », déclare l’un des manifestants, qui habite la zone depuis 70 ans.
« Quand les bandits font irruption dans la zone, nous n’avons pas les moyens pour résister à leur puissance de feu. Mais, dès qu’ils arrivent à ce carrefour, nous nous organisons pour les mettre en échec », avoue le septuagénaire, d’un ton ferme.
Sur le parcours, le slogan Bwa Kale a été repris en boucle par de jeunes femmes et jeunes hommes déterminés à défendre leur zone
Bwa kale est une forme de résistance populaire, visant à lutter contre les bandes armées, qui tentent de prendre le contrôle de territoires en toute impunité.
Au terme de la manifestation, des citoyennes et citoyens de la brigade de vigilance Fòs Rezistans Loten ont dénoncé, en conférence de presse, les exactions de bandits dans la zone, qui seraient identifiés comme des membres du gang Kraze baryè de Vitelhomme Innocent, selon des informations disponibles.
Les membres de ce gang armé tuent, violent, massacrent, pillent et incendient les maisons des résidentes et résidents dans la commune de Kenscoff.
« Nous, les membres de Fòs Rezistans Loten, nous nous battons jusqu’au bout pour défendre nos espaces de vie. Nous jurons de maintenir la brigade de vigilance, car c’est grâce à cette initiative que sommes encore en vie et que nous arrivons à protéger les communautés », lâche l’un des membres de la brigade de vigilance.
« Nous n’allons pas abandonner la lutte. Et Fòs Rezistants Loten va marquer l’histoire de la résistance populaire en Haiti ».
Plusieurs foyers de résistance se sont constitués dans la zone métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince, et dans plusieurs villes en province, en vue de contrer les actions criminelles des gangs armés, depuis le lynchage, le lundi 24 avril 2023, à Canapé Vert, de 14 présumés bandits, soupçonnés de venir en renfort à un groupe d’individus armés, qui tentaient d’installer leur base à Debussy, non loin de Turgeau.
Des brigades de vigilance dans différentes zones du pays se livrent à une justice expéditive contre toutes celles et tous ceux, qui seraient identifiés comme des bandits.
Plus d’une centaine de bandits ont été lynchés dans le cadre du mouvement Bwa kale, a souligné le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), dans un rapport en date du mardi 9 mai 2023.
L’Organisation des Nations unies (Onu) parle d’au moins 165 lynchages.
Dans un entretien à la plateforme AlterPresse/AlterRadio, le Groupe de travail sur la sécurité (Gts) a salué un début de réveil civique, à travers ce nouveau mouvement de résistance de la population contre les gangs armés.
Ce mouvement ne saurait, à lui seul, apporter des solutions durables au problème, reste, toutefois, convaincu le Gts.
Le Haut-commissariat aux droits humains (Hcdh) de l’Organisation des Nations unies (Onu) a dénombré plus de 600 personnes tuées, pour le seul mois d’avril 2023, dans la nouvelle vague de violence extrême, qui a frappé plusieurs quartiers, dans la zone métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince.
734 personnes ont été assassinées, soit une moyenne de 122 personnes par massacre, dans six parmi neuf massacres, perpétrés, d’avril 2022 à avril 2023, dans les départements de l’Artibonite et de l’Ouest, où se trouve la zone métropolitaine de la capitale, Port-au-Prince, a signalé le Rnddh.
105 femmes ont été victimes de viols collectifs, pour la plupart, soit une moyenne de 17 femmes et filles victimes de viols par massacre, a relevé le Rnddh.