Nouvelle publication sur la situation de l’insécurité alimentaire en Haïti

Écrit par Etzer S. EMILE / Economiste / etzeremile@gmail.com / Radio Vision 2000

 

Après deux longues années de sécheresse ayant affecté tout le pays, principalement le Nord-Ouest, le haut Artibonite, le Sud-Est, le haut Plateau et le Nord-Est, l’ouragan Mathieu a frappé de plein fouet la Grand-Anse, le Sud et les Nippes, des départements relativement moins concernés par les dernières sécheresses. D’autres départements ont été affectés par des inondations, le Nord et le Nord-Est particulièrement. Presque tous les départements du pays ont donc été plus ou moins affectés au cours de l’année dernière plus précisément entre les mois d’octobre à décembre. D’un autre coté, en raison des pertes de récoltes enregistrées et la forte dépréciation de la gourde par rapport au Dollar Américain, les ménages font face à une détérioration considérable de leur pouvoir d’achat, le taux d’inflation ayant atteint 15% en décembre dernier. Ces différents chocs ont sérieusement affecté les ménages au niveau des différentes zones de moyens d’existence du pays.

En termes de consommation alimentaire, au niveau des zones en crise, 6 à 7ménages sur 10 ont une consommation alimentaire inadéquate. Ce qui pousse ces derniers à adopter des stratégies d’adaptation affectant négativement leurs moyens de subsistance et 2 à 3 ménages sur 10 ont eu recours à des stratégies d’urgence (vente de maison, de parcelles ou d’animaux femelles, mendicité).

Les départements les plus affectés par le cyclone Mathieu en dépit de l’assistance alimentaire dont ils bénéficient sont classifiés en phase 3 (crise) selon les zones des moyens d’existence analysées. Sans une assistance alimentaire, ces départements se trouveraient probablement dans la phase 4 (urgence). D’autres départements un peu moins ou non affectés par Mathieu (Sud-Est, Haut Artibonite, Nord-Est) se trouvent classés également en phase 3, car en plus de souffrir de l’insécurité alimentaire chronique, ces département ont fait face à deux années consécutives de sécheresse. Plus précisément, le Nord’Est a enregistré des pertes de récoltes qui situent entre 75 et 85% suite aux inondations de novembre et de décembre.

En termes de perspectives, en raison des récoltes attendues à partir du mois de juin, on peut s’attendre à une amélioration de la disponibilité alimentaire locale au niveau des différentes zones d’analyse. Toutefois cette amélioration ne suffira pas pour induire un changement de phase au niveau des certaines zones notamment le bas Nord-Ouest, La Gonâve, Artibonite et la Grand-Anse en raison de la forte décapitalisation des ménages.

Ces zones d’analyse sont maintenues en phase de crise tandis que les autres passeront de la phase de crise à la phase de stress (Sud, Nippes, Sud-est, Nord-Est) ou en phase minimale (le département de l’Ouest). Certains facteurs risquent par contre de faire changer les scenarios comme une épidémie de Choléra pendant la période pluvieuse ; – le passage d’un ouragan entre juillet et septembre ; – des pluies plus faibles que la moyenne à des moments critiques des cultures entre juillet et septembre ; – l’assistance inadéquate de ménages ; – l’absence de réponse au plan de relèvement et des troubles socio-politiques. Ce nouveau rapport de la CNSA vient juste après le carnaval pour rappeler nos dirigeants qu’ils ont du pain sur la planche et qu’ils doivent agir s’ils veulent éviter toute catastrophe humanitaire.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *