Sans moyens, la Commission de désarmement négocie la réinsertion des chefs de gangs

Les chefs des groupes armés de Cité Soleil, de Martissant, de Grand-Ravine, de Croix-des-Bouquets, de La Saline, de Marchand Dessalines, entre autres, sont actuellement en pourparlers avec la Commission de désarmement et de réinsertion sociale sur la meilleure façon de déposer les armes. Ces chefs de gangs font beaucoup d’exigences. D’ici la semaine prochaine, la commission commencera à récupérer les armes à feu, a confié au Nouvelliste Jean Rebel Dorcénat, membre de cette structure présidentielle.

Pour déposer les armes, Ti Ougan, chef de gang qui contrôle une partie de Cité Soleil, exige, entre autres, la construction dans sa zone d’un centre de formation professionnelle. « Il nous a demandé aussi de parler avec l’équipe de Gabriel (NDLR : un autre chef de gang à Cité Soleil) pour qu’il ne les attaque pas pendant le processus de désarmement. Officiellement, Ti Ougan est prêt à déposer les armes… », a rapporté vendredi au Nouvelliste Jean Rebel Dorcenat, membre de la Commission de désarmement et de réinsertion sociale.

« Gabriel et Iska, deux autres chefs de groupes armés à Cité Soleil, sont prêts aussi à remettre leurs armes », selon Jean Rebe lDorcenat. « Nous avons aussi Lanmò Soljou qui a 349 hommes dans sa base à Croix-des-Bouquets qui nous a fait savoir qu’il veut lui aussi remettre les armes à feu qui sont en sa possession », a-t-il précisé.

Le chef de gang à Croix-des-Bouquets exige la réinsertion de ses 349 hommes sans risque d’être arrêtés par la police ou poursuivis par la justice. « Je lui ai dit que cela dépendra de leur implication dans des actes criminels… », a avancé ce membre de la Commission de désarmement et de réinsertion sociale.

Selon Jean Rebel Dorcénat , le chef de gang de Martissant connu sous le nom de Bougòy et celui de Fontamara, qui se fait appeler Kris la, ont aussi manifesté leur intention de déposer les armes.

S’agissant d’Arnel Joseph, le chef de gang et bandit le plus recherché par la police, accusé de viol, vol à main armée, assassinat, kidnapping, entre autres,  pour déposer les armes, il exige de la commission un magasin de produit agricole dans sa zone. Après avoir endeuillé la population et la police nationale, il veut maintenant tranquillement s’adonner à l’agriculture dans le département de l’Artibonite en toute impunité. Monsieur veut aussi que pendant les négociations avec la commission la police ne l’attaque pas… Jean Rebel Dorcénat a reconnu que le bandit Arnel Joseph a des comptes à rendre à la justice haïtienne pour les crimes qui lui sont reprochés.

Odma, le chef de gang de Savien dans le département de l’Artibonite qui avait déjà tué au moins un policier et blessé plusieurs autres, a aussi été en contact avec la commission.

Le Premier ministre nommé a déjà exhorté les groupes armés à déposer les armes. « Sinon, l’État, à travers les structures responsables, ira les chercher et tout le monde connait déjà les résultats… », a menacé le président du Conseil supérieur de la police nationale (CSPN).

« En grande majorité, ces groupes armés sont financés soit par des leaders politiques, soit par des membres du secteur privé », a dénoncé Jean Rebel Dorcenat, qui dit recevoir des menaces dans le cadre de son travail dans la commission. « Je n’ai pas peur. La paix doit revenir au pays… L’insécurité est le grand mal de ce pays… », a-t-il affirmé.

Dorcénat Jean Rebel a souligné au Nouvelliste que la commission ne peut pas se contenter uniquement de récupérer les armes à feu illégales sans s’assurer de la réinsertion sociale de ces individus. « Le ministère des Affaires sociales a mis à notre disposition un centre de formation à Bel-Air. La semaine prochaine, nous commencerons concrètement le désarmement », a-t-il annoncé.

Jean Rebel Dorcénat a souligné que depuis la création de la commission, le gouvernement n’avait pas mis des moyens de fonctionnement à leur disposition. Ce n’est que cette semaine que les autorités leur ont promis quelque chose. « Nous avons besoin de moyens pour avancer avec les discussions », a-t-il ajouté.

« Au moment où je vous parle (NDLR : vendredi 3 mai), nous n’avons pas encore reçu de moyens pour travailler. Mais le président de la République a passé des instructions en ce sens », a-t-il reconnu, soulignant que d’ici ce week-end le gouvernement va débloquer des fonds pour le fonctionnement de la commission.

La commission n’a pas un budget proprement dit puisque la plupart des projets de cette structure seront exécutés par les ministères sectoriels comme ceux de la Justice, des Affaires sociales et de l’Intérieur.

Personne ne peut dire avec certitude combien d’armes à feu illégales sont actuellement en circulation dans le pays. Entre 2004 et 2007, on comptait environ 300 000 armes à feu en circulation sur tout le territoire. « Aujourd’hui, plus de 10 ans après, ce chiffre devrait doubler, mais on ne peut pas le dire avec certitude », selon un membre de la Commission de désarmement et de réinsertion sociale.

Robenson Geffrard

Le Nouvelliste

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