Haïti – Économie: Bilan du secteur de la pêche maritime en Haïti entre 2011-2015
Le Ministère de l’Agriculture des Ressources Naturelles et du Développement rural a travers la secrétairerie d’Etat à la production animale a publié cette semaine un bilan sur la situation de la pêche maritime en Haïti entre 2011 et 2015.
Selon ce dernier rapport du ministère, la pêche maritime en Haïti fait vivre plus de 54,000 familles réparties dans environ 400 villages de pêcheurs sur nos 1700 km de cote. Ces 54 000 familles permettent au pays de disposer d’environ 15,000 tonnes de produits par an. Une production qui est bien sure insuffisante pour satisfaire la demande locale. Par conséquent, le pays importe annuellement environ 16,000 tonnes de poissons pour une consommation per capita est de 4,8 kg (soit la plus faible dans les caraïbes). En d’autres termes, le citoyen haïtien moyen consomme la plus faible quantité de fruits de mer par année au niveau de la Caraïbes. Faute de disponibilité, ou faute de revenu ou éventuellement raison culturelle ou tout simplement faute d’une bonne politique de pêche. Bref.
Parallèlement, Haïti arrive à exporter vers le marché international ses produits de la pêche, 800 T/an (principalement des langoustes, chair de lambi et octopus) pour une valeur de 10 millions de dollars.
De plus, il s’est développé soudainement depuis trois ans une intense activité d’exportation des anguilles de rivière (Anguilla rostrata): 6000 kilos exportés formellement au cours de l’année fiscale 2013-2104, sans compter l’exportation informelle, avec un prix payé aux pêcheurs locaux de $ 300.00 USD par kilo et un prix de vente internationale $ 2,500 / kilo. Cette activité aurait généré près de 15 millions de dollars USD, et ainsi donc aurait été l’un des premiers produits d’exportation du secteur rural.
En effet, les résultats enregistrés dans ce secteur quoique faibles, sont surtout dus au choix du gouvernement haïtien depuis 2009 d’installer les Dispositifs de Concentration de Poissons (D.C.P.) dans les eaux territoriales du pays. En fait, les DCP permettent aux pêcheurs d’aller chercher du poisson beaucoup plus loin dans la mer, donc de pratiquer la pêche « hauturière », c’est-à-dire au grand large, hors de vue des côtes.
En termes d’objectifs a l’horizon de 2017, le Ministère de l’agriculture veut faire passer la production nationale de pêche de 15.000 TM actuellement à 30.000 TM soit le double, et également arriver à faire générer par ce secteur des revenus annuels de 260 millions de dollars soit le double du revenu annuel actuel qui est autour de 130 millions de dollars.
Pour atteindre ces objectifs, le gouvernement compte prendre diverses mesures notamment en augmentant le nombre de dispositifs de Concentration de Poissons (D.C.P.) dans les eaux territoriales du pays, et également arriver à construire plus de centre de pêche. Des centres de pêche qui permettront de réduire significativement la perte de fruits de mer après récolte (estimée à près de 40%).
Des objectifs très ambitieux pour ces deux prochaines années par rapport à ce contexte politique et électoral et qui aura des impacts directs sur l’économie haïtienne.
Mais il faut l’admettre, c’est déjà positif de rendre public ces chiffres sur le secteur de pêche en Haïti, qui nous permettent d’avoir une idée sur le niveau de production et de revenu de ce secteur dans un pays ou les chiffres ne sont pas produits, ou ne sont pas toujours rendus publics. Toutefois il faut le reconnaître que les contraintes sont énormes, et les approches ne sont pas toujours les meilleurs sans compte le faible niveau de financement dans ce secteur. Egalement, nous refusons de croire que la pêche de survie à petite échelle qui consiste à distribuer des petits bateaux à des pécheurs isolés, peut donner des résultats considérables. Pour devenir compétitif, pour générer de l’emploi et constituer un facteur réel de croissance, le secteur de pêche doit devenir attractif pour pouvoir attirer des investissements de plus grande envergure, pour une production à grande échelle, sans pour autant éclipser les petits pécheurs. Sinon on restera dans une production marginale, qui ne correspond pas du tout avec notre potentialité de 1700 km de cotes. Un autre aspect important, est le développement insignifiant de la production de poissons dans des infrastructures artificielles ? Il y a certes des tentatives en ce sens, mais le développement ou l’intensification de ce modèle peut être un bon catalyseur pour le secteur pour la création d’emploi et la croissance.
Etzer S. Emile, M.B.A
Economiste
Radio Vision 2000