Haïti-Mines : Des organisations se méfient d’une nouvelle loi minière « attrayante »
Des organisations communautaires de base se mobilisent et forment des réseaux de résistance à l’exploitation minière au moment où le gouvernement haïtien s’empresse de préparer « une loi attrayante qui doit attirer des investisseurs ».
Dans le nord du pays, un tiers du territoire est déjà livré à des recherches, explorations ou licences d’exploitation à des entreprises étrangères. Près de 2,400 km2 ont été attribués à des firmes haïtiennes servant de paravent à des intérêts étatsuniens et canadiens. Certains estiment que la richesse minière d’Haïti – principalement de l’or, du cuivre et de l’argent – pourrait valoir environ 20 milliards de $US.
La livraison de permis à huis clos sans contrôle indépendant ou communautaire a soulevé la colère de plusieurs personnes en Haïti qui craignent que le gouvernement soit en train d’ouvrir le pays à un pillage systématique.
Cependant, le chef de l’agence minière gouvernementale ne semble pas préoccupé pour autant. Bien au contraire, il a déclaré à Ayiti Kale Je (AKJ) qu’Haïti doit se faire plus « attrayante » à de potentiels investisseurs.
« Nous avons besoin d’une loi minière qui soit attrayante. Une loi minière qui attire les investisseurs. C’est ce dont nous avons besoin », affirme Ludner Remarais, directeur du Bureau des mines et de l’énergie (BME), dans une interview accordée à AKJ.
La loi actuelle est dépassée, soutient Remarais.
La « ruée vers l’or » en Haïti est en cours plus ou moins depuis les cinq dernières années, du fait que le prix de l’or et d’autres minéraux a augmenté.
Jusqu’à l’année dernière, le gouvernement et les entreprises ont conclu des transactions à huis clos.
Après qu’une enquête ait révélé que 15 pour cent du pays étaient sous contrat, le 20 février 2013,le Sénat haïtien a adopté une résolution demandant que cessent toutes les activités afin de permettre un débat national et de procéder à des analyses de tous les contrats. Selon le BME, toutes les activités minières sont actuellement suspendues.
« La commission parlementaire a voté une résolution », note Remarais. « Nous respectons scrupuleusement la décision », mais, a-t-il ajouté, la résolution n’annule pas les droits déjà acquis.
Mobilisations dans les régions riches en or
Les associations paysannes, les organisations de défense des droits humains, les organismes de plaidoyer en faveur de la souveraineté alimentaire et de l’environnement sont préoccupées par les effets désastreux que l’industrie minière pourrait avoir sur la qualité de l’eau, les terres agricoles et sur les régions concernées en général.
Tèt Kole Ti Peyizan Ayisyen (Union des petits paysans haitiens), les Défenseurs des opprimés (DOP), le Mouvement démocratique populaire, la Plateforme des organisations de défense des Droits humains, la Plateforme haïtienne de Plaidoyer pour un développement alternatif et l’organisation Batay Ouvriye (Lutte Ouvrière) ont constitué le Collectif contre l’Exploitation Minière. Le réseau organise des séances d’information et de sensibilisation au bénéfice des associations locales.
Le 5 juillet, plus de 200 agriculteurs de la région autour du gisement de Grand Bois – à environ 11 kilomètres au sud de Limbé, dans le département du Nord – se sont réunis à Machabiel pour discuter de l’exploitation minière et de leur avenir. Dans une église et sous une chaleur étouffante, ils ont discuté de leurs tracas pendant trois heures.
« Quand quelqu’un parle d’exploitation minière, nous pensons à l’esclavage que nous avons connu dans notre histoire, l’accaparement de nos terres agricoles », dit Willy Pierre, enseignant en sciences sociales d’une école toute proche. « Nous risquons de perdre nos champs fertiles. Nous serons chassés de nos terres. Où irons-nous vivre ? » Lire la suite sur alterpresse.org