Haïti – Social : Sécurité alimentaire, l’aide humanitaire insuffisante
L’aide humanitaire ne suffit pas pour améliorer la sécurité alimentaire en Haïti. En dépit de l’aide, au moins un ménage sur cinq connaît des déficits alimentaires considérables et souffre de malnutrition aiguë. La situation de crise alimentaire, caractérisée par l’impossibilité des ménages de couvrir le minimum de leurs besoins alimentaires, aurait pu déboucher sur une phase d’urgence précoce, si des interventions humanitaires dans les zones affectées n’avaient pas eu lieu.
À titre d’exemple, un programme du PAM (Programme Alimentaire Mondial) « Supplementary Feeding Programme », a permis de nourrir 685,000 élèves et environ 145,000 femmes enceintes et allaitantes, ainsi que des enfants de moins de 5 ans. De plus, pour la réponse au passage de Sandy, le programme « Take home ration », a favorisé l’alimentation de 200,000 personnes, pendant une période de 15 jours. Une allocation de 5,2 millions de dollars américians, a été également donnée pour mener des activités « argent contre travail » aussi bien dans les zones affectées par Sandy, que dans celles qui sont vulnérables.
À travers le Fonds d’Assistance Économique et Sociale (FAES), le gouvernement a distribué 138,402 paniers de solidarité pour environ 5 millions de dollars. L’Agence américaine pour le développement international (USAID) a aussi financé des projet s à hauteur de 15 millions USD pour la distribution de nourriture, des transferts d’argent et pour la réparation des infrastructures. Pour sa part, le programme « « ECHO » (European Commission Humanitarian Office), a financé 7 millions de dollars, pour des actions liées à la production agricole et au secteur Eau, Hygiène et Assainissement (EHA).
Selon la Coordination Nationale de la Sécurité Alimentaire (CNSA), ces interventions humanitaires qui ont touché environ 700,000 personnes, restent insuffisantes et doivent se poursuivre pour éviter à environ 30 communes répartis dans 6 départements (Sud-Est, Plateau Central, Presqu’île du Sud, Nord-Ouest, Ouest, Artibonite, Ouest) de tomber dans la phase 4 de l’IPC (integrated food security classification – échelle de valeur indiquant les phases d’insécurité alimentaire)
Classification de la sécurité alimentaire (IPC) :
Phase 1 :
Accès à une alimentation généralement adéquate et stable avec un risque modéré à faible de tomber graduellement dans la Phase 3, 4 ou 5.
Phase 2 : Insécurité alimentaire modérée / limité
Accès limité à une alimentation adéquate avec un risque élevé et récurrent de tomber graduellement dans la Phase 3, 4 ou 5 (en raison de la probabilité d’évènements adverses et d’une grande vulnérabilité)
Phase 3 : Crise alimentaire et des moyens d’existence aiguë
Insuffisance aiguë et critique de l’accès à l’alimentation assortie d’une malnutrition grave et inhabituelle et un épuisement accéléré des avoirs relatifs aux moyens d’existence qui, si la situation se maintient, va faire tomber la population dans la Phase 4 ou 5 et/ou va probablement se traduire par une pauvreté chronique.
Phase 4 : Urgence humanitaire
Insuffisance grave de l’accès à l’alimentation assortie d’une mortalité excessive, une malnutrition très élevée et en progression et un épuisement irréversible des avoirs relatifs aux moyens d’existence.
Phase 5 : Famine / Crise humanitaire
Grave perturbation sociale assortie d’un manque total d’accès à l’alimentation et/ou d’autres besoins de base dans laquelle la famine généralisée, la mort et le déplacement sont incontestables.
D’un autre côté, le PAM souhaite réaliser, pendant la période de soudure, une distribution pour 145,000 personnes avant les récoltes de juin-juillet. M. Janne Suvanto, Représentant a.i, de l’organisation, indique cependant que les ressources ne sont pas disponibles.
Depuis octobre 2012, une augmentation des cas de malnutrition aiguë, mesurée par le Périmètre Brachial (PB), a été enregistrée dans plusieurs zones. La situation est particulièrement préoccupante au niveau de la commune de Moron (Grand‘Anse) où le nombre de cas a presque doublé, passant de 2.1 à 4%, entre décembre 2012 à janvier 2013. Dans le cas de la 3ème section Calumette et de la Baie d’orange, dans le Sud-Est, des interventions humanitaires ont permis de contenir l’évolution de la malnutrition aiguë.
D’autre part, l’arrivée de la saison des pluies préoccupe le PAM du fait du manque de financements pour les stocks de pré-positionnement dans les 4 départements où le PAM est basé (Gonaïves, Port-au-Prince, Jacmel et Cap-Haïtien). Selon les prévisions, il n’y aura plus de stocks disponibles à compter du mois de juin prochain et même avec un financement pour le renouvellement des stocks supplémentaires, les besoins en logistique, relatifs aux flottes de transport, aux ressources humaines et aux loyers, feront encore défaut et constituent par conséquent des défis majeurs.
Cette situation inquiétante, diminue en grande partie la capacité de réponse de l’organisation dont le mandat est de venir en soutien aux partenaires et au gouvernement en matière de stockage et de transport. Janne Suvanto a fait valoir la nécessité de continuer le plaidoyer pour la mobilisation des ressources et le travail continu avec le gouvernement pour des actions communes en faveur des populations dans le besoin .
Soulignons qu’avec le nouveau financement du volet « sécurité alimentaire et nutrition » du Plan d’action humanitaire 2013, à hauteur de 4,407,903 dollars, une meilleure réponse sera apporté aux populations et permettra l’atténuation de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition aiguë, principalement chez les enfants de moins de 5 ans.
Chiffres Clés :
6,7 millions de personnes en insécurité alimentaire en Haïti (4,1 millions en milieu rural, et 2,6 millions en milieu urbain) ;
5,2 millions en insécurité alimentaire modérée ;
1,5 millions en insécurité alimentaire sévère (792,758 femmes et 731,601 hommes) ;
81,600 enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition dont 61,200 enfants de malnutrition modérée et 20,400 de malnutrition aiguë. (haitilibre.com)