Haiti-Caraibes-Amériques : Jusqu’à quand le trafic de migrants haïtiens ?
Les deux premiers mois de l’année 2013 sont marqués par la recrudescence du trafic de migrants haïtiens en République Dominicaine, en Amérique du Sud et vers les côtes de Miami et des îles anglophones.
Tout semble indiquer que, profitant de l’impunité dont ils jouissent en Amérique Latine et dans les Caraïbes (à l’exception du Chili), les trafiquants s’organisent de plus en plus pour consolider l’industrie du trafic de migrants haïtiens du nord au sud de l’hémisphère.
En République Dominicaine
Une femme migrante, grièvement blessée, a été abandonnée le 26 février dernier par les trafiquants à l’hôpital de Dajabón (frontière nord avec Ouanaminthe) suite à un accident de moto, alors que les délinquants la conduisaient de la frontière à la localité de Navarrete.
La presse dominicaine a révélé que la migrante avait payé 4 mille pesos dominicains à un organisateur de voyages illégaux en échange de ses « services ».
Des réseaux de passeurs des deux pays promeuvent des voyages à travers presque tous les points frontaliers, mettant en danger la vie des migrants haïtiens, selon les différents rapports d’organisations de droits humains, dont le Groupe d’Appui aux Rapatriés et Réfugiés (GARR) et Solidarité Frontalière du Service Jésuite aux Migrants (SJM).
En Équateur
Environ 13 jeunes haïtiens ont été abandonnés à Quito, d’octobre à novembre de l’année dernière, après avoir versé 1.500 dollars américains à une organisation haïtienne qui leur avait promis des bourses d’études et des emplois dans ce pays sud-américain.
Cette organisation serait très sollicitée par des jeunes, désireux d’obtenir des bourses pour aller étudier en Équateur, en Argentine, au Chili, à la Jamaïque et au Brésil, selon les témoignages des victimes.
La Justice équatorienne peine encore à punir les personnes et organisations accusées du délit de trafic de migrants, en dépit de multiples témoignages et autres preuves présentées au cours des procès par les victimes et leurs avocats défenseurs.
Au Chili
Au Chili, trois trafiquants, dont un Dominicain et deux Haïtiens, ont été condamnés par la Justice de ce pays, au début de l’année, pour trafic de 18 migrants haïtiens. Délit qu’ils ont perpétré entre mars et juin de l’année dernière.
Le citoyen dominicain a été puni d’un emprisonnement de cinq ans et les deux Haïtiens, de trois ans et 541 jours respectivement.
La Police et la Justice de ce pays ont redoublé d’efforts pour traquer les trafiquants, quoique des organisations de migrants haïtiens à Santiago du Chili dénoncent des mauvais traitements infligés aux Haïtiens victimes de trafic.
Ceux-ci sont souvent détenus pendant plusieurs jours (en attendant le prochain vol de retour à Port-au-Prince) à l’Aéroport de Santiago du Chili, où les conditions de vie sont mauvaises. Ils sont mal nourris et mal logés, selon les témoignages recueillis.
Dans la mer des Caraïbes et sur les côtes de Miami
Au début de l’année, au nord d’Haïti les trafiquants continuent d’organiser des voyages ayant abouti au refoulement de boat-people.
Les garde-côtes américains ont rapatrié au Cap-Haïtien 168 migrants haïtiens du 6 au 13 janvier, alors qu’ils ont déporté 10 autres le 10 janvier.
Les garde-côtes américains patrouillent la mer des Caraïbes et se disent déterminés à refouler les migrants irréguliers vers leur pays d’origine.
Au Brésil
Le Brésil craint cette année une intensification du trafic de migrants haïtiens à ses frontières avec le Pérou et la Bolivie, en raison de ce que son Consulat à Port-au-Prince a déjà distribué les 1.200 visas humanitaires que le gouvernement de Dilma Rousseff avait offerts aux citoyens haïtiens, désireux d’aller travailler dans ce pays sud-américain.
En plus, il existe une demande de main d’œuvre haïtienne au Brésil, à l’approche de la prochaine Coupe du Monde Football qui aura lieu dans ce pays en 2014.
Plusieurs voix ont dénoncé la présence, à Port-au-Prince, d’un réseau de trafiquants haïtiens qui offriraient des visas brésiliens, très convoités, aux Haïtiens. La plupart de ces visas auraient ainsi été vendus.
Contacté par AlterPresse, le chargé des affaires consulaires de l’Ambassade du Brésil en Haïti, Victor Hugo Irigaray, assure que la situation est sous controle.
Selon lui, « aucun réseau de trafiquants ne fonctionne à partir de L’ambassade. Il y avait des soupçons sur un employé, qui a été révoqué en septembre dernier », ajoute-t-il.
Il est catégorique sur le fait que, suivant les informations de la police fédérale du Brésil, aucune personne n’a voyagé vers ce pays (en provenance d’Haiti) avec un faux visa.
Jusqu’à quand ?
A l’exception du Chili qui envoie des signaux clairs aux trafiquants de migrants haïtiens pour les dissuader, ceux-ci continuent d’avoir les coudées franches pour agir en toute liberté et en toute impunité dans plusieurs pays du continent. Jusqu’à quand ? (alterpresse.org)