Monde – Économie: Banque, blanchiment, terrorisme, Haïti doit agir

Source Patrick STPRE || Le Nouvelliste

Haïti, une fois de plus, est sur le point d’être victime de nouvelles mesures prises par les autorités américaines pour combattre le blanchiment d’argent et le terrorisme. Les banques haïtiennes risquent de perdre leurs banques correspondantes américaines ce qui provoquera à terme une crise financière et économique dans le pays.

 Une source proche de l’Association professionnelle des banques (APB), jointe au téléphone lundi après-midi, estime qu’une banque commerciale haïtienne qui perd une correspondante comme Bank of America signifie qu’elle ne peut plus faire des transactions sur l’extérieur. « Le problème est moins grave pour Novascotia et Citibank qui sont des succursales de banques étrangères. Tandis que les banques commerciales locales opèrent avec des capitaux privés d’origine haïtienne », a-t-elle déclaré.

Pour l’économiste Pierre Marie Boisson, cela rendra tout simplement les banques commerciales en Haïti moins aptes à fournir certains services à leur clientèle,  cela diminuera leur pouvoir commercial, leur compétitivité. « L’opération d’importation peut devenir plus couteuse et l’ensemble des opérations commerciales à l’étranger peuvent être contrariées », énumère ce dernier.

Le phénomène est connu sous le nom « de-risking ». Il est mondial et s’intensifie. Les dirigeants régionaux et les institutions financières internationales disent que les Caraïbes redoutent le poids de ces nouvelles mesures sur les petites économies régionales.

Les banques américaines font valoir qu’étant donné la petite taille des économies de la Caraïbe et les lourdes amendes actuellement imposées par les régulateurs, tentant d’endiguer le financement du terrorisme et le blanchiment d’argent, les risques de compensation des chèques ou de transfert d’argent à titre d’intermédiaires ne valent tout simplement pas la peine.

Un argument que les dirigeants des Caraïbes rejettent d’un revers de main arguant qu’il ne prend pas en considération les conséquences et les retombées imprévues.

« L’économie haïtienne, à l’instar des autres économies de la Caraïbe, est fortement importatrice […]  Le commerce est une fois et demie plus important dans le PIB [haïtien] que l’agriculture »,  rappelle l’économiste Boisson qui avance que toute entrave à l’importation la rend très cher et va provoquer une situation d’augmentation des coûts énorme, un ralentissement du commerce et de la consommation, par conséquent un ralentissement de l’économie. Le commerce en Haïti contribue non seulement à la consommation mais aussi à l’emploi.

Ailleurs, dans les Caraïbes, certaines banques locales ont été obligées de fermer leurs portes après que leurs correspondantes aux Etats-Unis ont coupé les liens, et les opérateurs de transfert d’argent ont fermé après avoir été empêché d’ouvrir des comptes bancaires aux Etats-Unis.

Aux Bahamas, deux banques locales et quatre banques internationales ont eu leurs relations rompues pour le moment. L’agence Western Union a également fermé, selon un rapport préparé par la Banque de développement des Caraïbes (CDB, en anglais).

Pour Haïti, qui reçoit des transferts de la diaspora représentant environ 25% de son PIB, la pilule risque d’être très difficile à avaler. « Les transferts aujourd’hui pèsent plus dans notre économie que l’agriculture », a fait savoir Kesner Pharel qui intervenait ce lundi matin sur les ondes de Magik 9 dans le journal économique « Kob & Co. » En 2015, les transferts représentaient 2.2 milliards de dollars américains contre 1,8 milliard de dollars américains de valeur ajoutée produite dans l’agriculture.

« S’ils sont en train de durcir les règlements aux États-Unis, nous autres aussi nous devons durcir notre position en matière de lutte contre le terrorisme et le blanchiment », a soutenu la source de l’APB qui a dit vouloir rester dans l’anonymat. Et cela pourrait ne pas suffire.

Comme en témoigne le Premier ministre des Bahamas, Perry Christie, cité par le Miami Herald,  qui rapporte que son pays a adopté de nouvelles lois, les lois anti-terrorisme, les lois anti-blanchiment d’argent et a signé des conventions fiscales. Mais cela n’a pas empêché les Bahamas d’être frappés de plein fouet pas ces mesures de réduction de risques.

Pierre Marie Boisson, de son côté, considère en Haïti qu’on est encore loin du compte, qu’on ne prend pas assez de mesures. Toutefois, il note des efforts consentis individuellement au niveau du secteur privé des banques qui signent directement des accords internationaux. « Il y a toute une batterie de mesures administratives qui doivent être prises par le gouvernement et qui ne dépend que de lui », rappelle-t-il.

Tout en fustigeant un certain courant nationaliste qui bloque systématiquement les tentatives de réforme et le vote des lois visant à mieux réglementer le système bancaire haïtien, l’économiste Kesner Pharel croit qu’il est important de se pencher sur l’aspect politique de la question. « Haïti ne peut pas mener seul cette bataille […] elle doit le faire à travers la CARICOM », a soutenu le PDG du Group Croissance.

Les dirigeants de la CARICOM ont donc convenu d’intensifier …..lire la suite sur radiotelevisioncaraibes.com

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