Lancement d’un programme national d’assainissement : toujours des projets/programmes mais pas de politique publique
Le gouvernement provisoire, en collaboration avec le ministère de l’intérieur et des collectivités territoriales, le ministère de l’économie et des finances et des maires de la région métropolitaine, a procédé ce week-end dernier au lancement d’un programme national d’assainissement, baptisé »Ayiti Pwòp », qui vise à attaquer ce problème de gestion des déchets dans le pays, notamment au niveau de la région métropolitaine, où se concentre plus de la moitié des activités économiques du pays.
Un programme de plus pour réduire le niveau d’insalubrité dans la capitale et dans certaines villes de province à très court terme, mais pas une véritable politique publique pour résoudre définitivement ce problème de déchets dans le pays et atteindre le 6ème objectif de développement durable des Nations Unies qui est »Eau propre et Assainissement ».
Ce programme national qui pourrait consommer une enveloppe budgétaire allant jusqu’à 100 millions de gourdes, soit environ 1.58 millions de dollars américains, ambitionne également de poser les bases pour arriver à un assainissement de la région métropolitaine de Port-au-Prince et de toutes les principales villes du pays, selon la note de la primature.
Il faut dire que la question de la gestion des déchets dans le pays était au centre d’un petit déjeuner-débat organisé il y a environ 10 jours par l’Association Touristique d’Haïti (ATH) qui croit que les déchets constituent tout un problème en termes d’incidence négative sur le secteur touristique. Selon les données fournies par le ministère de l’environnement lors de cette activité de l’ATH, la production des déchets dans le pays est évaluée à 5 millions de tonnes, dont 6 000 m3produits dans la capitale et seulement 30% ont pu être collectés.
Ca fait des décennies depuis qu’on parle de ce problème de gestions des déchets dans le pays et de beaucoup d’autres problèmes d’ordre économique et social qui ne sont jamais résolus. La raison est simple : en Haïti nous voulons toujours résoudre des problèmes de politique publique à travers de petits projets ou de programmes à très court terme.
Il est clair qu’on ne peut pas résoudre le problème des fatras dans les rues par des projets ou des programmes publiques, mais plutôt par une politique de gestion des déchets (waste management policy) qui puisse même aller jusqu’à l’adoption d’une législation définissant clairement les principes et les stratégies pour traiter les déchets produits dans le pays, avec une implication directe du secteur privé, et les sanctions réservées à un individu qui jette des fatras dans les rues, comme l’a bien fait la ville de Kigali au Rwanda qui était comme la ville de Port-au-Prince en terme d’insalubrité avant 2003 et qui est devenue aujourd’hui la ville la plus propre en Afrique.
Donc, cessons d’apporter des solutions traditionnelles à des problèmes de politique publique, comme celui de la gestion des déchets, et rentrons véritablement dans l’air de la modernité, de la politique publique et de la science pour apporter des solutions plus efficace et plus durable.
Riphard Serent, MPA (Policy)
Economiste