La Grande Chine développe ses zones franches. La République Dominicaine suit l’exemple. Qu’en est-il d’Haïti?
Depuis Septembre dernier La Grande Chine, deuxième puissance économique mondiale, avait lancé la zone franche de Shanghai (ZFS), que des analystes considèrent comme le laboratoire des réformes économiques de la Chine. Une zone franche pas comme les autres, mais grande d’une surface de 29 km2.
Cette zone franche de Shanghai doit permettre de mesurer la capacité de ce pays à conduire des réformes structurelles promises depuis longtemps, alors qu’il voit sa croissance ralentir et doit peu à peu abandonner les investissements publics massifs comme moteur de son économie, au profit de la consommation privée.
Au sein de la ZFS, la Chine autorise, à titre expérimental, la libre convertibilité du yuan sur les comptes de capitaux ainsi que des échanges transfrontaliers de sa devise. Elle y teste aussi une libéralisation des taux d’intérêts. Le renminbi (la monnaie chinoise) n’est actuellement pas convertible pour les comptes en capitaux dans le pays, le gouvernement chinois se méfiant des flux spéculatifs et maintenant un contrôle étroit sur ces mouvements. Les restrictions sur les investissements étrangers sont également assouplies dans la ZFS, où les règles régissant les activités des firmes étrangères et de leurs coentreprises avec des sociétés chinoises sont «temporairement ajustées» pour trois ans, depuis le 1er octobre 2013.
Il faut dire que la zone de Shanghai met l’accent sur les services, alors que les précédentes zones franches en Chine étaient plutôt dédiées à la production manufacturière. Parmi les nouveautés introduites par ce projet à Shanghai, ce sont les écoles et les hôpitaux qui sont construits dans la zone franche pour ainsi étendre les avantages sociaux des travailleurs et des communautés environnantes.
En République Dominicaine, on prend très au sérieux cette nouvelle initiative de la Chine. Ainsi, selon le journal dominicain Listin Diario, le président de l’Association dominicaine des zones franches Achille Bermudez a averti la semaine dernière sur les conséquences négatives que cette nouvelle franche de Shanghai pourrait avoir pour son pays, en particulier dans ce secteur. M. Bermudez a déclaré que les actions qui sont développées en Chine montrent que, malgré le haut degré de développement industriel de ce pays et une présence internationale des entreprises, la Chine croit et attribue un rôle important à développer et moderniser les zones franches de son économie. C’est donc une intention claire de ce géant asiatique d’élaborer une stratégie agressive pour améliorer la compétitivité dans l’intérêt de capturer un plus grand flux d’investissements. La Chine devient ainsi un concurrent à craindre dans ce secteur. Les dominicains sont donc très vigilants concernant ces tendances et veulent agir en conséquence, car la compétition est mondiale.
M. Bermúdez en termes de réaction, a recommandé aux autorités de son pays de surveiller ce nouveau processus en Chine, évaluer les impacts potentiels sur l’industrie locale et faire des ajustements en fonction des circonstances et de l’intérêt national.
Il faut noter que selon le rapport du Conseil national des zones franches de la RD l’investissement total accumulé dans les entreprises des zones franches dominicaines en 2012 est de 3,13 milliards de dollars américains. Les vêtements et les textiles représentent actuellement 25,3 % de l’investissement total cumulé, ensuite les produits médicaux et pharmaceutiques à 19,6 % et les produits du tabac à 16,2 %. Il faut dire que 48,7 % des investissements dans les zones franches dominicaines viennent des Etats-Unis, 26,9 % sont d’origine dominicaine et 5,9 % au Canada.
Aujourd’hui, il existe environ 57 zones franches en RD réparties dans tout le pays, pouvant accueillir près de 565 entreprises, contribuant plus de 175 000 emplois et générant 4,9 milliards de dollars en exportations, sans compter celles qui sont en construction.
En Haiti nous avons jusqu’a date une zone franche, celle de Ouanaminthe, le CODEVI (La Compagnie de développement industriel), fondée en 2003. Elle est la propriété exclusive du Grupo M, un fabricant de vêtements de la République dominicaine qui produit pour le marché américain et emploie environ 6500 personnes. A part celle la, toutes les autres zones franches haïtiennes sont des projets, des documents de travail, ou des promesses, alors que le parc de caracole peine à attirer des investisseurs.
Les zones franches ont leur faiblesse certes, notamment en termes de traitement des employés, mais, les pays émergents d’aujourd’hui sont passés par là. Donc, le développement de zones franches peut être une étape préliminaire dans la recherche de croissance, de création d’emploi et de développement. Toutefois, le développement des zones franches en Haïti confronte des obstacles qui ont été formulés dans un document de la SFI en 2011. D’abord, une procédure beaucoup trop lourde pour établir et enregistrer des entreprise, l’absence d’un système formel de titres fonciers ou de propriété et l’enregistrement des biens immobiliers; une administration complexe des douanes; la disponibilité limitée d’installations et de services publics; l’absence d’un code de construction moderne; le manque d’un mécanisme efficace de règlement des différends par le biais d’arbitrage international et médiation; l’absence de garanties suffisantes pour protéger les droits de propriété privée des investisseurs; et des structures juridiques, réglementaires et institutionnelles fragmentées en matière de zones franches, de parcs industriels et d’investissement en général.
Il faut qu’on s’attaque absolument à ces différents obstacles avec ses pieds sur terre et non pas des discours ronflants, pour arriver à développer des zones franches, bénéficier de leurs bienfaits et ainsi attirer effectivement des investisseurs.
Chiffre pour aujourd’hui: 90%
Les exportations de vêtements produits dans les entreprises manufacturières haïtiennes constituent 90% des exportations d’Haïti, la plus grande source donc après les transferts de fonds de la diaspora.
Etzer EMILE, M.B.A
Radio Vision 2000