Haïti – Tourisme: Haïti sans souci

Surf de fin de journée à Jacmel. PHOTO IVANOH DEMERS, LA PRESSE.

Aucun grand voyagiste n’avait osé la formule du tout-compris en Haïti depuis le Club Med, qui a fermé ses portes en 1987. Le nouveau forfait proposé par Vacances Transat depuis cet hiver relancera-t-il le tourisme dans ce qui fut un jour la Perle des Antilles? En tout cas, Haïti a tout pour redevenir une destination-vedette des Caraïbes.

La psychose du sida dans les années 80 et l’instabilité politique chronique après la chute de Duvalier en 1986 ont fait fuir les touristes d’Haïti, qui a déjà été une destination bien plus populaire que sa voisine, la République dominicaine, avec qui elle partage pourtant la même île, les mêmes plages éblouissantes, la même eau cristalline, le même soleil éclatant.

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Balade à proximité de Marigot, en Haïti.
PHOTO IVANOH DEMERS, LA PRESSE

Et si l’isolement dont a été victime ce pays depuis si longtemps devenait sa force? Pour mille raisons, Haïti n’a pas pu mettre en valeur son secteur touristique, mais par la même occasion, n’a pas non plus été «formatée» par les gros complexes touristiques. En cette époque où les destinations soleil tendent à se ressembler, cela vaut peut-être de l’or.

Quand on dit aux gens qu’on va en Haïti, la réaction est presque toujours la même. Pourquoi, bon Dieu? Pour travailler dans une ONG? Cela donne une bonne idée de la mauvaise image du pays à l’étranger. Pour avoir voyagé par mes propres moyens ou avec de bons contacts en terre haïtienne, je sais qu’il faut savoir s’organiser à l’avance. Mais ce que propose Vacances Transat avec ce forfait est une visite très bien encadrée, qui permettra aux curieux de se dépayser totalement à environ quatre heures de vol de Montréal. Et de se familiariser suffisamment avec ce pays inclassable, émouvant, toujours étonnant, pour avoir envie d’y retourner souvent, avec ou sans tout-compris.

Les nuits de Port-au-Prince

Dans ce forfait où l’on combine découverte culturelle et détente à la plage, on accompagne les touristes du début jusqu’à la fin de leur voyage, dès l’aéroport. Ce qui n’est pas de refus pour le néophyte qui ne parle pas le créole, langue nationale. Un guide est constamment avec vous.

Le plus étonnant est cette virée de deux jours dans Port-au-Prince, ville anarchique et plutôt hostile pour un nouveau venu – la promenade à pied est désagréable, disons, au travers des embouteillages et des rues abruptes parfois jonchées de déchets. Mais Portau-Prince renferme des trésors méconnus de tous.

D’abord, peu de gens savent que le luxe existe à Port-au-Prince. L’un des plus récents hôtels construits dans Pétion-Ville, le Royal Oasis, aux chambres gigantesques, va leur confirmer qu’on a bien l’intention d’offrir du quatre étoiles en Haïti, alors que juste en face s’étalent les bidonvilles sur la montagne. Or, voilà, le ministère du Tourisme haïtien a décidé, plutôt que de les cacher, de s’en servir. Les maisons du bidonville de Jalousie sont maintenant peintes en couleur pour offrir une vision saisissante de ces étranges termitières qui ont résisté au séisme. C’est aussi dans les plans de faire de l’endroit un lieu touristique, afin de voir de près ce projet-pilote qui rend aussi hommage au peintre Préfète Duffaut, mort en 2012.

Le voyage permet en outre de découvrir l’histoire et la vie nocturne de la capitale. Au menu: visite et dîner au parc historique de la Canne à sucre – vous ne trouverez pas meilleur jus de canne! -, visite du village de Noailles, où tous les artisans de fer taillé ont pignon sur rue. Cette technique artistique est si populaire en Haïti qu’on voit partout ces oeuvres impressionnantes – dont vous pourrez profiter si vous êtes tenté d’en acheter une. Ensuite, on fait un crochet vers le musée du Panthéon national d’Haïti, essentiel pour en apprendre plus sur la riche et tragique histoire du pays. Une portion du musée est consacrée à l’art haïtien, qui jouit d’une belle réputation dans le monde. On vous fera aussi visiter des galeries de Pétion-Ville où il vous faudra beaucoup de volonté pour résister aux superbes toiles exposées.

Deux coups de foudre: le déjeuner à l’observatoire de Boutilliers, au top du top de Port-au-Prince. La vue y est époustouflante sur la ville, on a envie d’y passer la journée. Et cette incursion au Marché en fer, immense fatras d’objets divers, d’art vaudou, d’aliments et d’épices, au coeur du quartier commerçant, au plus près du quotidien des Haïtiens, constitue un vrai choc culturel.

Un incontournable pour tout visiteur en Haïti: le spectacle de RAM au mythique hôtel Oloffson. Tous les jeudis, la foule s’y déhanche avec joie dans un décor figé dans le temps. Mais on peut tout autant s’amuser dans les bars de Pétion-Ville, au Quartier Latin ou au Presse-Café. En fait, la musique est partout en Haïti et partout elle est irrésistible, partout, l’ambiance est chaude, partout, on vous fera danser. Dans ce pays, on écoute essentiellement le kompa et la musique racine, sinon, la radio fait tourner en boucle les grands succès de la chanson francophone (Céline Dion et Ginette Reno sont ici des reines, vous voilà prévenu).

Farniente haïtien

Après un programme aussi décoiffant en seulement deux jours, on n’est pas fâché d’aller se reposer sur la plage. La partie la plus importante du voyage se déroule sur la côte des Arcadins, très prisée par les Haïtiens eux-mêmes. Mais l’absence de touristes en Haïti crée une atmosphère un peu surréaliste: les hôtels ne sont pas bondés, et les plages sont pratiquement vides! Ce qui explique sûrement pourquoi le barman fiche parfois le camp à 22h, vous laissant penaud au retour de la douche… C’est d’ailleurs la principale faiblesse en Haïti, que tous les propriétaires d’hôtel reconnaissent: un service souvent inégal, bizarre, lent. Mais toujours d’une grande politesse. On trébuche aussi sur toutes sortes de petits détails qui pourraient irriter les habitués des complexes cinq étoiles impeccables: absence de séchoir à cheveux ou de shampoing, pannes de courant, manque d’eau chaude, guichet automatique défectueux, et rares sont les toilettes publiques si vous partez en excursion! Il faut savoir prendre Haïti avec ses défauts.

Sur la côte des Arcadins, des activités sont proposées en supplément. Elles en valent la chandelle. Les amoureux de la randonnée apprécieront, s’ils sont en forme, la promenade de deux heures en montagne jusqu’à Kay Piat, où les paysans cultivent le cresson. On vous permettra de vous baigner dans un bassin d’eau fraîche, à même la source qui alimente la culture (vous ne trouverez pas d’eau plus froide en Haïti, mais tout Québécois qui se respecte s’est déjà baigné dans des lacs bien plus glaciaux). L’excursion en bateau à l’Anse-aux-Raisins de l’île de la Gonave est un incontournable: mer magique, dégustation de langoustes grillées qu’on vient tout juste de pêcher devant vous, plongée en apnée… Vous pensez alors à toutes ces images terribles d’Haïti que vous avez vues dans votre vie, et vous constaterez que vous ne savez absolument rien de ce pays.

Mon verdict: avec seulement 30 places par mois, réservez vos billets rapidement. Ce forfait a toutes les chances de devenir très «tendance». (http://www.lapresse.ca)

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Les frais de voyage de ce reportage ont été payés par Vacances Transat.

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