Haïti-Cinéma: « Assistance mortelle », Haïti, laboratoire de tout ce qu’il ne faut pas faire

« Assistance mortelle », c’est le titre d’un documentaire sur l’échec de l’aide humanitaire à Haïti, trois ans après le terrible séisme qui avait pourtant soulevé une vague énorme de solidarité internationale. Le réalisateur, Raoul Peck, est haïtien lui-même. Il a suivi pendant trois ans les coulisses de cette aide massive et la gestion de cette catastrophe par la communauté internationale. Le documentaire sera diffusé ce soir sur La Une.

Haïti est devenu « un laboratoire sur tout ce qu’il ne faut pas faire ou qu’il ne faut plus faire« , explique Raoul Peck.

« Haïti, c’est simplement le dernier exemple en date de cette formidable débâcle de ce qu’on appelle l’aide au développement, depuis un peu plus de 60 ans, c’est-à-dire une aide qui n’en est pas une, une aide qui a beaucoup plus à dire aux donateurs qu’aux receveurs. Dans le cas d’Haïti, on vient de le voir encore, beaucoup d’effet d’annonce alors qu’en gros, il y a moins d’un quart de cette aide qui est vraiment déboursée. Cet argent est souvent dans des coffres et ne va jamais jusqu’à la population« , a encore confié le réalisateur à notre journaliste Françoise Wallemacq.
« Donc oui, c’est compliqué à expliquer. Comment on arrive à cette espèce de grande machine sans dirigeants en fait puisque chacun fait ce qu’il veut de son côté?« , s’interrogeait le cinéaste sur les ondes de la Première ce matin.
« On perpétue ce mouvement, ce mode de fonctionnement et personne n’ose dire que ça ne fonctionne pas et qu’il faut arrêter« , déplore-t-il. « C’est vrai que quand il y a un malheur, il faut aider, tout de suite, rapidement. Mais ensuite, il ne faut pas s’incruster, il ne faut pas commencer à s’ingérer dans la réalité du pays, à influencer les échéances politiques, les choix économiques, etc. Or, c’est ce qui se passe régulièrement« .
Mais quels intérêts représente ce petit pays des Caraïbes pour les Américains ? « D‘un simple point de vue financier, je pourrais dire que quand le Congrès américain vote 2,5 milliards d’aide pour Haïti, il y a 800 millions qui vont au bénéfice de l’armée américaine« , fait-il remarquer.
Des fonds avec lesquels, l’US Army a pu « engager ses soldats pendant plusieurs mois à pratiquement ne rien faire puisque Haïti n’est pas un pays en guerre. On paie toutes les dépenses de porte-avions, les dépenses de bateaux, les dépenses médicales, l’aide, même l’eau qui est importée par des avions! Des avions qui sont loués, or ces locations sont payées par l’argent promis à Haïti« , dénonce Raoul Peck.
« Les bouteilles d’eau ne sont pas gratuites, c’est payé à des compagnies américaines alors qu’on aurait pu acheter local. N’importez pas de la marchandise venant de l’extérieur parce que vous cassez l’économie locale. Mais personne ne respecte ça. C’est ça le drame, c’est que les organisations internationales ne respectent pas leur propre charte« .
Ecoutez l’intégralité de l’interview de Raoul Peck dans l’Expresso ci-après

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