Haïti-Migration: Destination Chili !!!
Source Patrick Saint-Pré | Le Nouvelliste
Partir à tout prix. Jamais un choix n’a paru aussi évident, aussi clair dans l’esprit de nombreux Haïtiens. Pour eux, partir est devenu un exutoire, la seule initiative viable. Ils s’en vont sans jeter un seul regard en arrière, sans un remords. Ils étaient plusieurs centaines ce mardi 15 août 2017, le jour de l’Assomption, à s’entasser dans la salle d’enregistrement de l’aéroport international Toussaint Louverture, passeport et billet d’avion en main, se préparant à mettre les voiles, destination Chili, où ils vont accroître le nombre des plus de 44 000 de leurs compatriotes qui se sont déjà installés là-bas en 2017.
Mardi dernier, en début d’après-midi, après être venu à bout d’un embouteillage monstre sur la route menant à l’aéroport, arrivé à hauteur du parking, d’un simple coup d’œil en face, on voit la saignée. Mieux que tout ce qui se dit sur les réseaux sociaux ces derniers jours ou tous les articles qui ont été écrits sur le sujet. Il fallait le voir pour se rendre compte à quel point le pays est en train de se vider. Il ne s’agit pas de gens qui profitent de ce jour férié pour faire une escapade à Miami ni de la diaspora haïtienne qui repart après avoir bouclé ses vacances au pays. Rien de tout cela. Les Haïtiens partent, tout simplement. Massivement. Hommes, femmes, jeunes et vieux prennent un aller simple pour le Brésil ou le Chili.
Dans la salle d’enregistrement, les comptoirs de deux compagnies aériennes en particulier débordent. Au fond à gauche, en entrant, la ligne de passagers, immensément longue, avance à pas de tortue, tant au comptoir de Copa Airlines, compagnie réputée et récompensée à plusieurs reprises pour sa ponctualité, qu’à celui de Latin America Wings (LAW). Résignés, ils prennent leur mal en patience. Sans émettre aucune plainte ni récrimination, conscients qu’ils ne sont qu’à un pas de quitter définitivement Haïti.
« Les gens ne veulent plus rester en Haïti », déclare Fabien, la vingtaine avancée, après un long moment de silence. D’un calme olympien, il raconte qu’il va rejoindre un pote à Lampa : « J’ai un ami à Santiago qui a acheté mon billet, il pense que je viendrai chez lui mais je vais retrouver mon ami d’enfance qui est également mon condisciple ». « Je pars à 5 heures, peut-être 6 », a déclaré Fabien d’un ton dubitatif, incapable de préciser l’heure exacte de son vol. Bon cœur, il ne va pas tenir rigueur à LAW pour une heure ou deux de retard, lui qui n’a jamais auparavant quitté son patelin de Lascahobas. « Avant, nous avions l’habitude d’organiser chaque année un championnat de quartier pour les vacances », a confié le jeune homme, soulignant que le comité organisateur a dû y renoncer cet été, faute de joueurs. Ils se sont tous envolés pour le Chili.
Dans la chaleur moite de la salle d’enregistrement de l’aéroport international de la capitale, car la climatisation même à fond n’arrive pas à faire son travail face à cette foule compacte, la force vive de la nation est en train de foutre le camp sous le regard impassible, indifférent des douaniers et des agents de sécurité de l’aéroport. « Tiens, il y a beaucoup plus de monde que d’habitude », a balancé l’un d’entre eux, en mâchonnant un cure-dent tout en triturant sa barbe mal entretenue, avant de se tourner vers un agent de la police nationale pour pronostiquer le résultat du classico entre le Real Madrid et le FC Barcelone de mercredi.
Même si le vol de LAW ne décolle qu’à 5 heures, bon nombre de passagers disent…………………………..lire la suite sur lenouvelliste.com