Haïti-Minustah-Crise : « Il y a urgence », selon Sandra Honoré

Par Gotson Pierre | Photos : Jude Stanley Roy

P-au-P., 1er fév. 2015 [AlterPresse] — « Il y a urgence pour que les acteurs haïtiens trouvent (…) une issue consensuelle » à la crise politique, à quelques jours de la fin du mandat du président Michel Martelly le 7 février prochain, déclare Sandra Honoré, cheffe de la Mission de stabilisation de l’Onu en Haïti (Minustah), dans une interview accordée à AlterPresse.

Le processus controversé des élections législatives et présidentielles ayant été interrompu, un vide institutionnel guette Haïti au départ de Martelly à l’échéance constitutionnelle du 7 février.

Sandra Honoré estime que les propositions de sortie de crise, formulées par des partis, regroupements politiques et organisations de la société civile, démontrent un « grand intérêt de la société pour une solution à cette impasse ».

Dans cette interview, dont l’intégralité est transcrite ci-dessous, des questions relatives aux critiques adressées à la communauté internationale, à l’efficacité ou non de la Minustah et au problème de l’épidémie du choléra, dont la responsabilité est attribuée à l’Onu, sont également abordées.

AlterPresse – Le Conseil de sécurité exprime des inquiétudes sur la situation en Haïti. Qu’est-ce qui est le plus inquiétant ?

Sandra Honoré – Le plus inquiétant est que nous sommes arrivés à une semaine à peu près de l’échéance constitutionnelle du 7 février et le processus électoral qui a été entamé en 2015 pour le renouvellement du parlement, des postes dans les municipalités, n’a pas terminé, y compris l’élection pour un nouveau chef de l’État et les élections pour les collectivités territoriales, qui n’ont pas eu lieu jusqu’à présent.

Apr – Donc, c’est le vide qui va être créé qui est problématique ?

S.H. – Je crois que ce qui est problématique est que ce processus initié en 2015 n’a pas pu arriver à son terme, à sa conclusion logique, et, comme vous l’avez évoqué, le fait qu’il y a urgence pour que les acteurs haïtiens trouvent une solution, une issue consensuelle…

Apr – Comment évaluez-vous les efforts en cours (pour faire face à cette situation) ?

S.H. – Je préfèrerais ne pas faire une évaluation des efforts en cours. Je me limiterais à reconnaître le fait qu’il y a plusieurs propositions de sortie de crise qui ont été avancées par des partis et des regroupements politiques, par des organisations de la société civile. Ce qui démontre le grand intérêt de la société d’une manière générale pour contribuer à une solution à cette impasse, une solution consensuelle qui soit acceptée, pour faire en sorte que le pays puisse aller de l’avant et que l’attention puisse être concentrée sur les grands défis auxquels le pays fait face.

Je dois reconnaître qu’au niveau de l’exécutif et du législatif il y a également des efforts solides pour trouver une solution.

Apr – Le président Martelly a dit que c’était possible également qu’il reste (au pouvoir) après le 7 février…

S.H. – Je sais que l’exécutif et le législatif sont en train de travailler sur une solution et je préfèrerais donner le temps nécessaire, et Dieu sait qu’il ne reste pas beaucoup de temps avant l’échéance constitutionnelle… Alors je préfère laisser le temps à ce travail qui est en cours entre l’exécutif et le législatif et espérer qu’ils prendront également en compte les positions et les opinions qui ont été avancées pour une sortie de crise de part et d’autre dans la société.

Apr – La Minustah, assiste-t-elle à ces négociations ?

S.H. – Non. La Minustah n’assiste pas à ces négociations. C’est une discussion, une négociation haïtienne. De sorte que la Minustah encourage les acteurs à parvenir à une solution, mais ne participe pas aux négociations.

Apr – Comment accueillez-vous la démission du président du Conseil électoral provisoire (Cep) Pierre-Louis Opont ?

S.H. – Le rapport de la commission indépendante d’évaluation électorale a fait un certain nombre de recommandations. Le rapport a parlé de replâtrage du Cep. Je crois que la démission de la part d’un certain nombre de membres du Cep répond en partie aux recommandations de la commission. Si ces démissions vont servir à faciliter la route vers la poursuite du processus électoral, processus pour lequel il y a eu beaucoup d’efforts consentis par le gouvernement, le Cep, les partenaires d’Haïti qui l’ont appuyé, je crois que tout effort pour faire avancer le processus est bienvenu. Surtout, notre intérêt est que le processus électoral se poursuit, parce qu’évidemment il a été interrompu le 22 janvier.

Apr – En général, la communauté internationale et l’ONU souhaitent que ce processus aboutisse « rapidement ». Dans votre discours, que veut dire exactement « rapidement », en terme de temps ?

S.H. – Je ne pourrais pas donner un délai. On n’a pas parlé de rapidement. Il faut garder à l’esprit que le travail national sur le processus électoral a commencé au début de janvier 2015. On est maintenant en janvier 2016. Ce n’est pas un processus qui a été organisé à la hâte. Le fait est que le processus n’est pas arrivé à son terme, à sa conclusion logique et il est nécessaire, pour compléter les 6 sièges vacants au sénat, les 27 à la chambre des députés, l’élection présidentielle et les autres élections qui doivent se faire, éventuellement celles des collectivités territoriales (…), il est important pour Haïti, dans sa marche démocratique, de le conclure.

Apr – Qu’est ce qu’on peut dire : 2 mois, 3 mois, 6 mois, 1 an ?

S.H. – Je laisserais aux autorités en place, au parlement, à l’exécutif, aux faiseurs d’opinion dans la société, inspirés par la constitution, d’établir le délai qui soit nécessaire, mais avec l’espoir que ce délai ne va pas être illimité dans le temps, pour que le parlement puisse être complété et que l’élection présidentielle continue.

Apr – En tant que mission de stabilisation, la Minustah a-t-elle un plan pour l’après 7 février ?

S.H. – La Minustah n’est pas l’État haïtien. La Minustah n’est pas l’autorité parlementaire haïtienne. La Minustah n’est pas le gouvernement haïtien.

Apr – Mais vous êtes une mission de stabilisation…

S.H. – Nous sommes une mission de stabilisation et notre travail consiste à appuyer les autorités haïtiennes pour les taches qui leur incombent. Le Conseil de sécurité a toujours été très clair dans ses résolutions et dans le mandat qu’il a donné à la mission, que la responsabilité principale incombe aux acteurs, aux autorités haïtiennes. Donc, notre travail, est une exhortation et un encouragement aux autorités haïtiennes à prendre les meilleures décisions possibles dans l’intérêt du peuple haïtien, mais dans les capacités et souveraineté d’autorités nationales.

Apr – En terme de stabilisation qu’est-ce qu’on peut dire 12 ans après la mise en place de la Minustah. La mission est une réussite ou un échec ?

S.H. – Je peux dire que les résultats de stabilisation en Haïti depuis l’établissement de la mission en 2004 démontrent qu’il y a eu du progrès dans le pays. Haïti aujourd’hui est un pays différent de ce qu’il était en 2004, quand la mission a été établie. Évidemment, dans la recherche (je ne dirais pas de la perfection) du mieux être et du mieux faire, nous pouvons tous, même dans les pays développés, faire davantage. Je conçois le travail de la mission comme ayant contribué à un progrès en ce qui concerne la stabilisation en Haïti, mais un travail qui doit continuer, non seulement de la part de la Minustah – à laquelle, comme vous le savez, le Conseil de sécurité a déjà donné un mandat très clair, qui concerne la consolidation et l’éventuelle transition de la mission – mais aussi de la part de l’État haïtien, du gouvernement et de tous les acteurs de la société civile.

Apr – Le président a fait appel à une mission de médiation de l’Organisation des états américains (Oea), qui se trouve présentement en Haïti. Quelle attitude la Minustah va-t-elle maintenir par rapport à cette mission ?

S.H. – La Minustah a son mandat du Conseil de sécurité des Nations-unies. Selon ce mandat, notre travail, lire la suite sur alterpresse.org

Une pensée sur “Haïti-Minustah-Crise : « Il y a urgence », selon Sandra Honoré

  • 1 février 2016 à 6:10 PM
    Permalink

    Il y a urgence ?? Maintenant Sandra Honoré voit qu’il y a urgence, c’est dommage! Sandra Honoré, cheffe de la Mission de DÉSTABILISATION de l’Onu en Haïti devrait se sentir responsable de cette urgence si elle était honnête. Il ne faut pas oublier que Minustah est toujours impliquée dans toutes les magouilles et les actes malhonnêtes visant à déstabiliser Haiti. MINUSTAH n’a rien à faire en Haiti , son rôle consiste à s’assurer que les serviteurs de leur patron puissent agir en toute impunité. Minustah ferait mieux de laisser Haiti.

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *